La GSR 600 reprend le bloc de la GSXR 600 2005 et avec ça, tout est presque dit. La GSR ne révolutionne pas le genre. Nous découvrons un roadster sportif et joueur, animé d’un moteur de « sapetoku » revisité à la baisse pour la puissance, à la hausse pour le couple. Oui mais voilà : ça ne suffit pas. L’agrément dégagé par ce genre de moteur ne nous convainc pas à l’usage. C’est certes très amusant d’allumer le compte-tours, de ressentir la bonne santé du moteur entre 10 et 14.000 tr/min. C’est amusant, un peu… On se retrouve régulièrement à un régime bien plus bas, le moteur faisant preuve d’une excellente souplesse, et lorsque vous ouvrez à 5 ou 6.000 tr/min, fût-ce pour vous dégager d’un mauvais pas ou pour effectuer un dépassement, il ne se passe pas grand-chose. Vous voilà bon pour rentrer deux ou trois rapports, et ça prend du temps…
Trois axes
Suzuki nous explique avoir œuvré sur trois axes pour la création de la GSR. Tout d’abord un design très travaillé, puis une image sportive alimentée par des caractéristiques avancées, et enfin une volonté de combiner la puissance exigée d’un modèle sportif et la facilité d’usage attendue d’un roadster de gamme moyenne. Le résultat final reflète assez bien ces trois axes : le dessin est en effet recherché, peut être trop. La ligne est assez compliquée, un peu massive, ce qui peut paraître flatteur pour certains qui auront l’impression d’en avoir une « grosse », mais au final, se démarque-t-elle tant que ça d’une FZ6, sa cible désignée ? Même avant, même pot sous la selle… Sympa, les pots sous la selle, mais à quel prix : rangements quasi inexistants sous les sièges, impossibilité d’arrimer quoi que ce soit, merci les aspects pratiques ! L’image sportive se retrouve dans la position de conduite, dynamique, avec des repose-pieds peut-être un peu hauts perchés, une selle assurant une excellente position, la partie passager surélevée formant dosseret.
Agrément moteur ?
Le cadre périmétrique en alu exhibe sans pudeur ses formes et se termine par un bras oscillant sophistiqué qui ne déparerait pas sur une supersport. Le collecteur d’échappement sous le moteur se pare d’un sabot assez sportif lui aussi. La puissance, elle aussi, est au rendez-vous. Pas de problèmes, ça « cause » quand on ouvre en grand. Les « kékés » qui aiment les démonstrations de force apprécieront. Les plus placides goûteront à la souplesse du quatre cylindres pour enrouler en douceur et se retrouver à 100 km/h aux environs de 5 ou 6.000 tr/min, sans jamais se faire peur : même en ouvrant les gaz en grand, il leur faudra un certain temps pour atteindre 10.000 tr/min. A l’essai, la GSR d’acquitte très honorablement de sa tâche. Position de conduite sympa, nous l’avons dit, un peu sportive sans en faire trop, un châssis très sain, qui n’a montré ses limites qu’en forte accélération dans une courbe marquée d’une saignée transversale violente. La moto a légèrement louvoyé, mais s’est stabilisée immédiatement. Pour le reste, pas de soucis. Stabilité impériale à grande vitesse, préservant une vivacité de bon aloi en courbe.
De solides qualités
Le freinage lui aussi revendique le terme « facilité », l’attaque initiale est peu mordante, ce n’est pas avec un doigt sur le levier que vous lèverez la roue arrière. A contrario, plus vous exercez de force sur le levier, plus vous freinez. Ca paraît stupide, mais voilà de quoi effectuer en toute quiétude de solides freinages. Le pilote expérimenté y trouve son compte autant que le néophyte, rassuré de ne pas « piler » à chaque fois que vous effleurez la poignée de frein. Pareil pour le frein arrière avec lequel vous aurez du mal à bloquer la roue sur le sec, malgré une efficacité certaine ! Sans conteste un des points forts de la Suz. Comme d’habitude sur les japonaises, boîte et embrayage se font complètement oublier, preuve de leur qualité. Sous les yeux, un tableau de bord lisible et complet avec température d’eau, jauge, deux trips, horloge, indication du rapport engagé, compteur digital. Que du bonheur ! Tout au plus regrettera-t-on de ne pouvoir afficher heure et kilométrage de concert.
Quelques lacunes
La finition de la bête paraît plus léchée que sur d’autres modèles Suzuki, même les clignotants arrières prennent un dessin original, ainsi que les avants, intégrés au réservoir. Est-ce dû à l’aspect massif de celui-ci que la GSR braque aussi mal ? Ça lui enlève une part de maniabilité pour slalomer en ville. S’il paraît gros d’aspect, il est pourtant petit de contenance : il n’emmène que 16,5 litres du précieux liquide. Sachant que vous en brûlerez facilement sept ou huit au 100 km en conduite « active », les escales seront fréquentes ! Bon point par contre pour la clé codée, équipement indispensable et pourtant trop souvent absent de beaucoup de modèles.
My GSR
Comme il devient de règle, Suzuki propose de nombreux accessoires permettant de personnaliser la GSR. Certains purement esthétiques (caches divers, saute vent), d’autres plus utiles comme des crash pads, un système d’alarme, de la bagagerie, voire des échappement Yoshimura… La belle (surtout en rouge !) s’affiche à 7500 euros, le prix d’une Kawa Z750S, 1200 euros plus chère qu’une ER6N plus agréable à l’usage, 100 euros moins chère qu’une Hornet, 300 euros de plus qu’une FZ6, largement plus chère aussi qu’une SV ou une Bandit. La GSR est une bonne moto (y en a-t-il de mauvaises d’ailleurs ?) mais, malgré tous les efforts de Suzuki, elle aura du mal à se démarquer franchement de ses concurrentes qui affichent pour la plupart le même genre d’arguments. Seul Kawa a joué l’audace dans cette catégorie en présentant une moto plus fine d’aspect, au dessin peut être plus original, et pourvu d’un moteur certes moins rageur mais plus rempli, que ce soit en couple ou en agrément. La vérité de l’un n’étant pas celle d’un autre, les amateurs de roadsters quatre cylindres ne feront pas un mauvais choix en plébiscitant la GSR 600.
© Bruno Wouters