Style
En ces temps d’autophobie menaçante, où il fait bon de s’afficher en Smart diesel ou en Prius, un monstre de près de 500 chevaux n’est pas le meilleur engin pour épater la petite filleule écolo. Mercedes a donc joué la carte de la discrétion, et c’est très bien comme cela. On remarquera juste les inévitables logos AMG, les jantes de 19 pouces griffées elles aussi et les quatre tuyères d’échappement. En mouvement, la sonorité profonde qui s’en échappe ne laisse planer aucun doute quant aux prétentions sportives du monstre.
Sous le capot
481 chevaux à 6.800 tr/min et un couple terrifiant de 630 Nm, voilà les valeurs ahurissantes avancées par AMG pour leur nouveau moteur. Auparavant, le préparateur utilisait la suralimentation pour ensorceler les mécaniques Mercedes. Un procédé efficace, mais sans doute pas le plus noble. Les motoristes se sont donc résignés à abandonner toute forme de turbo ou de compresseur pour leur nouveau moteur, qu’ils voulaient atmosphérique. Pour en tirer des performances similaires, voire supérieure, une seule solution s’offrait à eux : augmenter la cylindrée. Le nouveau cœur de cette Mercedes voit donc grand, niveau capacité : 6,3 litres ! On se croirait revenu au temps des légendaires muscle cars américaines !
Et sur la route, ça donne quoi ? Je ne surprendrai personne en affirmant que ça pousse ! Avec 481 chevaux, on s’attend naturellement à des performances ébouriffantes ! Et… elles le sont ! Il suffit d’effleurer la pédale de droite pour jouer au yo-yo avec son permis… Pour les dépassements, il s’agit là d’un engin redoutable ! Cette Mercedes excelle vraiment dans l’art de jouer à saute-mouton ave les petites citadines mazoutées.
Au niveau de l’agrément, ce moteur est une pure réussite. Disponible dès les plus bas régimes, il reprend avec force sur toute la plage de régimes. Une vraie perle et qui n’attend pas des régimes stratosphériques pour envoyer les occupants sur orbite ! Souple, il devient carrément dévastateur à partir de 4.000 tr/min, un régime auquel plus rien ne lui résiste. L’aiguille du compte-tours semble alors aspirée par la zone rouge, située 3.000 tr/min plus haut ! Il s’exprime alors d’une voix sourde et profonde, propre à remuer les tripes des occupants. La sonorité a donc également été travaillée, étant nettement moins « sage » que sur les autres produits de la marque. Un vrai festival !
Par le passé, AMG suralimentait via un compresseur les V8, qui développaient dès lors des valeurs de couple « camionesques », dépassant les 700 Nm. On imagine dès lors la torture engendrée pour la transmission. Raison pour laquelle, elles devaient s’en tenir à la boîte 5, seule capable d’encaisser une force pareille ! Cette mécanique-ci étant revenue à des valeurs de couple plus raisonnables, Mercedes a pu sereinement envisager de l’accoupler à la boîte 7, laquelle a été revue par AMG, dans le but de la rendre plus réactive. Que ce soit en mode « confort » ou « sport », cette boîte réagit avec bonheur, gagnant en vivacité ou en souplesse selon le mode, mais ne manquant jamais de douceur. Seul le mode manuel déçoit un peu, les passages de rapport étant un peu lents. A noter que Mercedes a doté cette version extrême de palettes derrière le volant.
Tenue de route
Avoir une telle propulsion entre les mains incite naturellement à pas mal de circonspections ; c’est qu’on ne lâche pas impunément une telle cavalerie n’importe où ! Mais si l’on garde toujours cette règle en tête, on remarque que cette CLK offre un comportement très sain et équilibré. La suspension, en particulier, semble remarquablement filtrante. Comme toute Mercedes, l’ESP n’est jamais réellement déconnectable. Les amateurs de drifts et autres joyeuses glissades seront tout de même rassurés : avec près de 500 chevaux sur les seules roues arrière, le dosage de l’inclinaison du pied droit devient élémentaire !
Le freinage ne mérite que des éloges : voilà une auto qui freine encore mieux qu’elle n’accélère. Lorsque l’on connaît les performances de l’engin, on peut admirer la performance. De plus, le ralentissement est facile à doser et le système semble endurant. Que du bon ! Pour peu, on se croirait chez Porsche !
Confort
C’est sans doute ici que Mercedes abat sa carte maîtresse. Face à des supercars d’une puissance démesurée mais affublées de suspensions bloquées, la Mercedes offre un superbe compromis qui garantit un confort certain. Le filtrage est remarquable, que ce soit sur des routes bosselées ou pavées, les vertèbres resteront intactes. Il s’agit là d’un véritable tour de force, au vu de l’efficacité routière.
L’habitabilité est généreuse, surtout à l’avant où l’espace disponible est royal. Les grands gabarits devront courber l’échine pour ne pas heurter le toit à l’arrière, surtout avec le toit ouvrant optionnel. Le conducteur, quant à lui, trouvera immédiatement une bonne position de conduite et toutes les commandes lui tomberont naturellement sous la main. Heureusement, Mercedes n’est pas encore tombé dans les travers de l’i-Drive de BMW, mais il faut malgré tout un petit temps d’adaptation avant d’assimiler le maniement des commandes de divertissement.
Le coffre est très spacieux, se révélant profond, même si son accès est quelque peu étriqué. Enfin, l’insonorisation ne mérite que des éloges, tant elle filtre avec justesse les sons environnants. Seule la voix grave, profonde et envoûtante du moteur se fait entendre.
Tarifs et équipements
Pour disposer d’une CLK 63 AMG « toute simple », il faudra s’alléger de quelque 103.455 €. Une jolie somme, surtout si on la compare à celles demandées pour accéder à une RS4 ou à la future M3, toutes deux d’environ 25-30.000 € moins cher. Mais voilà, la CLK se positionne sur un marché pour le moins singulier. Basée sur une Classe C, elle concurrence à ce niveau la RS4 et la M3, toutes deux elles aussi développées sur une berline de gamme moyenne. Mais par sa puissance, de 60 chevaux supérieure à ces deux dernières, la CLK 63 AMG affronte directement la Porsche 911 Turbo, rien que ça ! Tout aussi puissante, la Porsche est elle, de 40.000 € plus chère et bien moins habitable ! Reste l’image de marque… Se situant au milieu de toute cette meute germanique surmotorisée, la Mercedes justifie donc son prix ; surtout que l’équipement est complet, à quelques basses mesquineries près ! Reste un challenger, venant d’outre Atlantique cette fois : la Corvette Z06, armée de 512 chevaux et disponible dès 83.450 € ! Une sérieuse « challenger », même si l’ambiance course est là beaucoup plus typée et s’il ne s’agit que d’une stricte deux places !
De série, une fois n’est pas coutume, la dotation se montre plutôt généreuse : sellerie cuir Nappa, sièges multicontours chauffants, régulateur de vitesse, volant multifonction, GPS ainsi qu’une foule de babioles aptes à nous faciliter ( ?) la vie. En revanche, il reste malgré tout quelques mesquineries en option, comme les phares bi-xénon avec éclairage actif des virages (1.690,37 €), le système carte main libre (1.258,40 €), le système Harmann-Kardon (814,33 €), les rétroviseurs intérieur et extérieur automatiques à commutation jour/nuit (370,26 €),…
Enfin, un petit mot sur la consommation : certes les 20 litres de super 98 exigés en moyenne par la Mercedes semblent impressionnants, mais au vu de la cylindrée et des performances réalisées, il n’y a là, rien d’excessif ! Surtout qu’une utilisation autoroutière aux vitesses légales permettra de faire abaisser cette valeur jusque 14,5 litres, voire moins. Mais bon, si vous recherchez un engin pour faire des economy run, prière de voir ailleurs, voire de passer à une CLK diesel…
Conclusion
Capable de performances météoriques, la CLK 63 AMG n’en garde pas moins de formidables aptitudes de grande routière. Si la consommation ne les effraie pas, elle saura garder les occupants au frais, même après un périple de plusieurs milliers de kilomètres. Une performance rarement atteinte dans la catégorie… Son prix en paraîtrait même presque justifié ! En somme, une Mercedes aussi puissante qu’une Ferrari, mais qui garde une certaine discrétion, ce qui est appréciable en ces temps d’autophobie, et dotée d’un confort unique dans le segment. De quoi raviver l’attention sur une CLK vieillissante !