Pour tout savoir sur l’état de la recharge bidirectionnelle en Belgique, nous nous sommes entretenus avec Bart Massin. Ingénieur de formation, CEO et fondateur de la société Stroohm qui conseille, forme, installe et optimise tous types de borne de recharge. Il est également président de l’association EV Belgium. Autant dire qu’il connaît tout ce qu’il y a à savoir sur les bornes de recharge bidirectionnelle en Belgique.

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Qu’est-ce qu’une borne de recharge bidirectionnelle ?

Avant d’entamer la discussion avec notre interlocuteur du jour, peut-être est-il préférable de rappeler ce qu’est une borne de recharge bidirectionnelle. Comme son l’indique, il s’agit simplement d’une borne capable d’injecter, mais également de réutiliser les ions stockés dans la batterie d’une voiture électrique. L’objectif est d’alimenter une maison ou de les réinjecter directement dans le réseau. Mais en réalité, tout cela est loin d’être si simple. Afin d’être réutilisée, l’électricité stockée dans la batterie d’une voiture doit être retransformée en AC (courant alternatif) car elle est toujours stockée en DC (courant continu). Aujourd’hui, tous les véhicules électriques ne disposent pas d’un chargeur embarqué capable de refaire cette transformation. Et même lorsque c’est le cas, la borne doit non seulement être capable de synchroniser la fréquence de l’électricité en provenance de la voiture avec celle du réseau, ce qui est en loin d’être simple, mais également être approuvée et certifiée par les différents gestionnaires du réseau électrique. Heureusement, c’est aujourd’hui le cas de plusieurs bornes de recharge pour voiture électrique dont les prix tournent en moyenne aux alentours des 1.000 €. Si le véhicule n’est pas capable de retransformer l’électricité stockée en DC vers du AC, c’est alors la borne qui doit s’en charger en plus de la synchronisation des fréquences. Nettement plus technologiques, ces bornes sont également plus chères et coutent alors en moyenne 5.000 € hors installation pour le moment.

 

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Peut-on déjà faire de la recharge bidirectionnelle en Belgique en 2024 ?

Actuellement, il est effectivement déjà possible de faire de la recharge bidirectionnelle en Belgique, mais il y a de très (très) nombreuses contraintes en plus de celles des bornes de recharge. Il faut d’abord un véhicule capable de restituer l’électricité dont il dispose. De nombreux modèles peuvent aujourd’hui techniquement le faire, mais uniquement techniquement comme nous l’explique Bart Massin : « La recharge bidirectionnelle, ça demande aussi une communication entre la voiture, la borne et le gestionnaire de réseau. Le problème aujourd'hui, c'est que tous les constructeurs bloquent cette fonctionnalité via le logiciel embarqué dans leurs véhicules. Actuellement, je ne connais aucune marque qui autorise cette communication, sauf Nissan avec les anciennes Leaf qui disposent encore d’une connexion CHAdeMO. Pourquoi ? Parce qu’aujourd’hui toutes les garanties de batterie ne sont pas basées sur les cycles de charge, mais sur un kilométrage. Le maximum qui est disponible aujourd'hui, c'est le V2L. » Et cette base kilométrique plutôt que sur les cycles de recharge ne pose pas de problèmes qu’aux constructeurs. « Aujourd’hui en Belgique, il y a environ 300.000 voitures électrifiées et la majorité sont des véhicules de société. Le problème, c'est que dès qu'on va utiliser la batterie pour alimenter une maison ou le réseau, on va utiliser davantage de cycles de charge. Une batterie peut encaisser en moyenne 3.000 cycles ce qui représente entre 1 et 1,2 million de kilomètres. Si l’on utilise par exemple 300 cycles additionnels par an en effectuant de la charge bidirectionnelle, cela équivaut quand même à environ 100.000 km d'usage que l’on va ajouter à la batterie. Les sociétés de leasing ne sont pas adaptées à ce changement. Elles louent leur voiture en se basant sur des kilométrages parce que cela équivaut à l'usage actuel d’une voiture thermique. Mais ce n’est plus forcément le cas avec les voitures électriques. Pour faire de la recharge bidirectionnelle, certaines sociétés réclament même un supplément afin de compenser la diminution de la valeur résiduelle dû au vieillissement prématuré de la batterie », précise Bart Massin.

 

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Pour résumé, est-il possible de déjà faire de la recharge bidirectionnelle aujourd’hui en Belgique ? Oui, mais uniquement en étant propriétaire d’une Nissan Leaf disposant d’une prise CHAdeMO et d’une borne de recharge bidirectionnelle adaptée.

Cela vaut-il quand même la peine d’acheter une voiture et/ou une borne de recharge bidirectionnelle aujourd’hui pour utiliser cette fonctionnalité dans le futur ?

Si l’objectif premier de l’achat est d’économiser de l’argent dans un futur proche, alors la réponse est non. Mais cela ne signifie pas pour autant que vous devriez passez votre chemin si cette technologie vous passionne véritablement. « On achète plus que le produit, on achète aussi la connaissance qui va avec », nous confie Bart à juste titre. Il ajoute également : « est-ce que tout le monde doit déjà acheter une borne bidirectionnelle aujourd'hui ? Non, c'est sûr et certain, ça n'est pas encore le cas. Elles sont uniquement destinées aux quelques personnes qui possèdent une voiture potentiellement capable faire de la recharge bidirectionnelle (comme les Renault 5 E-Tech, Hyundai Ioniq 5 et 6, Kia EV6 et 9, Tesla, etc. ndlr), les contrats d’électricité adéquats, qui aiment la technologie et qui aiment surtout jouer avec tout ça. Pour une telle personne, oui, ça devient intéressant parce qu’il apprendra comment optimiser les coûts d'électricité. » Il ne fait également aucun doute que cette technologie va s’implémenter et devenir importante à l’avenir. Mais avant, de nombreux aspect doivent encore être optimisés comme les contrats d’énergie et même les compteurs électriques. « C'est une chaîne dont tous les maillons ne sont pas encore finis », clôture Bart. On se donne donc rendez-vous dans quelques années pour refaire un état des lieux de la recharge bidirectionnelle en Belgique.