BMW investit sur l'avenir, avec un brio et une réussite que de nombreux constructeurs doivent envier. Faut-il citer l'i3, déjà sur nos routes, ou la prometteuse i8 qui fera, n'en doutons pas, le bonheur de quelques happy fews fortunés? BMW Motorrad ne veut pas rater le train de l'électromobilité, un prolongement logique de l'Urban Mobility qui donna naissance voici deux ans aux scooters C 600 et C 650.

Seuls les constructeurs automobiles (et motocyclistes), conscients que le seul recours au transports en commun ou à la petite reine ne résoudra pas les enjeux posés par la mobilité de demain, semblent proposer de nouvelles pistes.

Celles-ci passent aussi, bien entendu, par le deux roues motorisé, une solution de repli pour les constructeurs de voitures, qui se doutent bien que le tout à l'automobile mène à une impasse, une piste pour laquelle la motorisation électrique pourrait avoir une belle carte à jouer dans les grands centres urbains sujets à la pollution atmosphérique et sonore.

Une place à prendre

Il ne faut pas chercher plus loin la genèse du C evolution. Si la concurrence, déjà bien implantée, est rude dans le segment convoité par les classiques C 600 Sport et C 650 GT, il en va tout autrement dans le domaine de la mobilité électrique. Qu'y trouvons-nous? Sortis des modestes mais non dénués d'intérêt petits scooters électriques d'origine chinoise, sans autre prétention que de se mesurer à un classique cyclomoteur, il ne reste que les scooters Vectrix, électrocutés par la faillite de leur constructeur ou les exotiques motos Zero Engineering, modérément crédibles au titre de réponse aux exigences de la mobilité urbaine.

Il reste un boulevard donc pour de nouveaux acteurs, parmi lesquels les constructeurs de voitures, riches de la puissance de leur département R&D et de moyens autrement plus ambitieux que ceux des constructeurs de deux-roues. Mini avait présenté un prototype un peu trop "fashion" pour se montrer vraiment crédible, Smart (lisez Mercedes!) y travaille très sérieusement, même si une éventuelle commercialisation est provisoirement postposée et BMW communique sur le sujet depuis un bon moment.

Synergies

Faut-il rappeler qu'après l'inclassable C1, trop en avance sur son temps et perfectible, l'allemand l'a remis sur le métier avec un C1 électrique autrement plus séduisant, avant de s'investir dans le développement du C evolution, un maxi scooter électrique aux prestations interpellantes. Fort de sa compétence acquise durant le développement de sa gamme BMW i, le constructeur allemand a mis au point un engin très abouti techniquement. Un "caisson" en aluminium coulé sous pression, élément central de la machine, abrite les éléments de la batterie et les composants électroniques qui les gèrent.

A ce caisson central se rattachent les éléments périphériques, comme la tête de direction ou le bras oscillant et la boucle arrière. Le moteur électrique refroidi par liquide est logé dans le bras oscillant, et transmet la puissance à la roue arrière via une courroie crantée intégrée au carter. Les chiffres parlent d'eux mêmes: la puissance maximale est portée à 35 kW, soit 47,5 ch, et le couple de 72 Nm est disponible de 0 à 4.500 trs/min. Le 0 à 50 km/h est obtenu en 2,7 secondes, le 0 à 100 en 6,2 secondes, mais la vitesse est limitée à 120 km/h.

Des chiffres

La batterie lithium-ion, refroidie par air avec ventilateur d'appoint possède une capacité de 8 kWh et l'autonomie est donnée pour une centaine de kilomètres, avec une charge oscillant entre deux heures quinze et quatre heures suivant le niveau de décharge de la batterie (80 ou 100%) et l'ampérage du courant de charge (12 ou 16 A), sur une prise domestique de 220 V. Pas de miracle: le C evolution affiche sur la balance un robuste 265 kg… Pas léger face à un Tmax de 221 kg, mais guère plus qu'un C 600 (249 kg) ou un C 650 (261 kg), et moins que certains gros scooters GT comme le Kymco MyRoad 700 (281 kg) ou le Suzuki Burgman 650 (277 kg).

Quelques points de la fiche technique suscitent encore l'intérêt, comme le limiteur de couple "Torque Control Assist" (TCA), indispensable avec un couple aussi vigoureux disponible immédiatement. Plus amusant, mais non dénué d'intérêt, le petit bouton "Reverse" qui permet de manœuvrer le scooter en marche arrière! Plus important, la récupération d'énergie à la décélération et au freinage, qui justifie la présence de quatre modes de conduite aisément sélectionnables tout en roulant.

Modes

Le mode Road associe la pleine puissance à une récupération d'énergie à la décélération modérée, le mode Eco Pro limite l'accélération, et donc la consommation, tout en récupérant au maximum l'énergie à la décélération. Le mode Sail ne récupère pas l'énergie, laissant l'engin en roue libre à la coupure des gaz (coupure du courant serait plus exact, mais pas encore vraiment rentré dans l'usage…), tandis que le mode Dynamic reprend le meilleur du Road et de l'Eco Pro, à savoir accélération et récupération maximales. Dans tous les modes, la récupération d'énergie est activée au freinage. A propos de freinage, notons que si l'ABS répond évidemment présent, pas question ici de freinage couplé.

Le design du C evolution plaît, c'est peu de le dire au vu des réactions qu'il suscite. Nettement plus soigné et mieux fini que les scooters thermiques du constructeur, le C evolution n'est disponible qu'en Blanc lumière uni et Vert électrique, une harmonie tout en fraîcheur qui marque aux yeux de tous la singularité de son mode de propulsion. Le ravissement continue avec le superbe tableau de bord se résumant à un écran couleurs TFT joliment fiché derrière le pare-brise non réglable, et débordant d'informations diverses appelées via le commodo gauche.

Terminons le tour du propriétaire en relevant encore quelques aspects pratiques comme l'emplacement sous la selle passager, capable d'accueillir un intégral (en taille XXL, un collègue qui a la grosse tête a vérifié!) et l'emplacement prévu dans le tablier pour le câble de recharge.

BZZZZZZZZ…

Les premiers tours de roue aux commandes d'un véhicule électrique surprennent toujours. L'engin, paraissant inerte un instant auparavant, se met immédiatement en mouvement, sans la moindre vibration, quasiment sans aucun bruit. La réactivité à la poignée, immédiate, témoigne du couple maximal entièrement disponible dès la mise en mouvement. Si le gabarit et la position de conduite ne surprennent guère l'habitué d'un maxi scooter, le confort et l'agrément de conduite du C evolution lui paraîtront à des années lumières de sa monture habituelle, soudainement complètement obsolète et dépassée.

Fan de scooters, je me régale au guidon du BMW. Scrupuleux, je joue des quatre modes, abandonnant immédiatement le Sail qui supprime tout frein moteur, et donc la récupération d'énergie. Je m'accommode assez facilement, dans la circulation de Barcelone, du caractère placide de l'Eco Pro, jusqu'à un redémarrage en côte qui me laisse pratiquement sur place, et finis par privilégier le mode Dynamic au mode Road, pour son freinage moteur tellement puissant qu'il permet quasiment d'accélérer et de freiner jusqu'à l'arrêt complet en ne jouant que de la poignée de gaz, un exercice particulièrement amusant et facile.

Un autre monde

Le confort qu'apporte l'absence de vibrations et de nuisances sonores, hormis un chuintement qui semble échappé d'un film de science fiction et quelques résonnances à très basses vitesse, sans doute provoquées par une vibration de la courroie, rien ne vient troubler une expérience de conduite qui enterre le moteur à explosion dans ce contexte de mobilité (extra)urbaine.

Le comportement dynamique du C evolution ne cède pas un pouce de terrain face à ses frères thermiques, d'autant que le centre de gravité bas placé rend l'engin aussi agile que stable. On en vient à s'impatienter de la suite: si BMW défriche le terrain avec un produit haut-de-gamme, il sera suivi par des offres plus accessibles. Des batteries plus performantes, moins de poids, moins d'encombrement, l'arme absolue est pour demain, mais la proposition actuelle ne manque pas d'arguments, et seul le prix de 15.500 € constituera un frein à sa diffusion.

L'autonomie

Pour le reste, c'est quasiment le sans faute, à quelques détails près comme une selle un peu large à l'arrêt, une selle nécessitant la clé pour se déverrouiller et ne tenant pas ouverte toute seule, l'emplacement de rangement du chargeur nécessitant un minimum d'application pour la mise en place de celui-ci, ou l'absence d'un petit vide-poches dans le tablier pour un téléphone et quelques papiers. Des détails, vous en conviendrez! Mais je devine la question qui vous brûle les lèvres: l'autonomie! Les cent kilomètres promis par BMW sont bien réels. Notre parcours, très varié, incluait de la pure ville, une belle montée vers le parc naturel de Collserola qui surplombe Barcelone, le retour vers la ville avec un bout d'autoroute, quelques tours sur la colline de Montjuich, terrain d'exploit des célèbres 24 heures moto et même de quelques grand prix de formule un dans les années '70, soit près de 65 km. Suivant les scooters, il restait entre 40 et 47% de charge, soit une autonomie de 45 à 57 km, et je vous promets que nous n'avons pas pleuré sur l'essorage de poignée durant la journée!