Ce boxer en tenue sportive garde toute l’originalité BMW. Par son flat d’abord, véritable marque de fabrique du constructeur allemand. Il revendique ici 122 ch, soit la plus forte puissance jamais développée par un boxer de série. Ce twin est élaboré à partir du bloc apparu sur la 1200GS. Le régime de rotation est supérieur, le taux de compression passe à 12,5:1, les conduits d’admission et d’échappement sont revus à la hausse. La «98» est recommandée, même si elle accepte de rouler à la «95» moyennant une légère perte de puissance. Le châssis doit lui aussi beaucoup à ses aînées, on retrouve le Telelever à l’avant et le Paralever à l’arrière, avec transmission par arbre, bien entendu. Le freinage diffère quelque peu: deux disques avant pour un arrière, bien sûr complétés par un abs en option, mais point d’assistance ni de freinage combiné avant – arrière. Position (un peu !) sportive La prise en main ne surprendra guère les aficionados de la marque. La selle culmine a une hauteur raisonnable et la position raisonnablement basculée sur l’avant, certes plus exigeante qu’une sport tourisme (BMW ST, Triumph Sprint ST, Honda VFR,…) est autrement moins radicale que celle habituellement imposée par les pures sportives japonaises ou italiennes. On touche d’ailleurs ici la grosse différence entre une sportive telle que l’entendent habituellement les constructeurs et la conception qu’en a BMW. La 1200S reste une BM: fonctionnelle et exploitable; nous n’en voudrons pour preuve que l’ABS, la transmission par arbre, ou les poignées chauffantes! Sport en ville Enfin une sportive sur laquelle on se sent bien. D’accord, la ville n’est pas spécialement sa tasse de thé et les embouteillages finiront par vous peser sur les poignets, mais la souplesse et le coffre à mi-régime du boxer la rendent malgré tout exploitable sur ce terrain. Le flat accepte sans rechigner de reprendre sur un filet de gaz dès 2000 tr/min. La position de conduite relativement naturelle, par rapport à ses concurrentes qui semblent n’être taillées que pour les circuits, s’accompagne d’un réel confort de selle et d’un rayon de braquage tout à fait acceptable pour la ville, même si il reste peu de place pour la main entre le guidon et le réservoir. Tout au plus regrettera-t-on, et c’est commun à toutes les BMW, quelques réactions parasites du cardan à basse vitesse. Non, le vrai bonheur se retrouve sur la route, où la vigueur du moteur, le confort et l’efficacité de la partie cycle peuvent donner toute leur mesure. Et sur route Le bicylindre à plat reprend depuis 2000 tr/min avec une vigueur réjouissante pour s’emporter une première fois vers 5000 tr/min et une deuxième fois vers 7000 tr/min jusqu’à la zone rouge, dans un ronflement qui rappelle les « Rennsport » de la grande époque, celle où les BMW de compétition écumaient les circuits. Du flat comme ça, on en redemande! Vif, bien rempli, puissant mais sans violence exagérée, on prend plaisir à le mener à tous les régimes et de toutes les manières. Cette qualité s’attribue aussi à l’excellente partie cycle. Massive selon les critères des sportives japonaises, elle reste cependant sous les 200 kg à sec et sa ligne très travaillée permet à son pilote de l’enserrer au plus près et de faire corps avec elle. Confort monoplace Les recettes appliquées au châssis sont reprises du reste de la gamme ‘R’. Le treillis d’acier s’articule autour du moteur et la roue arrière est portée par le monobras Paralever. La 1200S reprend le principe initié sur la 1100S du pot sous la selle, ce qui a comme effet de ménager une vue magnifique sur la roue arrière, de six pouces en option. Une selle minimaliste surmonte le pot, au grand désespoir de notre chère passagère, qui n’a pas du tout aimé, et qui est resté insensible à nos arguments vantant l’étonnant confort de cette BMW, pour une sportive s’entend. Le moignon de selle passager se termine par un petit feu à led, très joliment réussi: le capotage horizontal en plastique translucide le prolongeant vers la selle devient luminescent la nuit. Inutile, invisible, sauf à se retourner pour le voir, mais tellement design… A l’avant, le tête de fourche à l’intérieur dépouillé et high-tech fait corps avec le réservoir. Il offre aussi une protection bien réelle, qui participe à l’indiscutable confort de conduite prodigué par la spectaculaire allemande qui ne ressemble à aucune autre. Un plaisir de tous les instants Le tableau de bord est repris d’autres modèles de la gamme, avec compteur et compte-tours analogiques sur fond blanc et pavé à cristaux liquides, hélas peu lisible de jour. Bizarrement, pas de jauge ici, simplement un témoin de minimum et un décompte du kilométrage restant avant la panne sèche. La fourche, spécifique à BMW, reprend le système du Telelever. L’ensemble du châssis offre une rigueur et une rigidité remarquable, la stabilité en courbe ne souffrant pas la moindre critique. La moto suit sa trajectoire comme sur un rail, sans le moindre flottement ou annonce de guidonnage. Le flat vous catapulte d’une courbe à l’autre avec force. Le freinage qui, à la différence des autres ‘R’, n’est pas assisté, fait preuve d’un feeling et d’une efficacité rassurante. Il permet de maîtriser les entrées en courbe d’autant plus facilement que le système Telelever empêche la moto de plonger et préserve une assiette horizontale. La BMW est efficace en toutes circonstances, peut-être pas la plus efficace, mais très efficace ! Et surtout, elle procure un plaisir de tous les instants, et en toutes conditions. Le droit à la différence C’est sans doute ce qui la différencie de ses concurrentes toujours plus radicales et plus exigeantes. La R1200S n’est jamais une punition et c’est sans doute là sa première qualité. La définition de sportive, telle que l’entendent nos amis japonais ou italiens, donne naissance à des bijoux de technologie, mais c’est peu dire qu’elles n’ont plus leur place sur route ouverte. La BMW R1200S apporte un vent de fraîcheur dans ce créneau et si elle ne convaincra sans doute pas les « tapés » de la R1-GSXR-CBR-ZXR, elle mérite toutefois de toucher une frange plus large que celle des aficionados de la marque à l’hélice, tant elle peut apporter satisfaction à son pilote. Le meilleur de deux mondes S’il n’est pas rare qu’une BMW puisse rouler en toute saison sur tous les types de trajets, il est plus rare qu’une sportive le puisse. Cette BMW relie deux mondes que tout opposait à priori. Et à 13300 €, elle n’est même pas plus chère que ses concurrentes sportives. Notre modèle d’essai était généreusement pourvu d’options d’usine. Certaines, accentuant son côté sportif, comme la suspension Ohlins à 655 €, d’autres plus roule-toujours, comme l’ABS débrayable à 965 €, un must, les poignées chauffantes à 210 €, d’un grand réconfort lors des petits matins blêmes ou des soirées trop tardives, ainsi que l’alarme couplée à la clé codée. © Bruno Wouters