Mais qui vous êtes, vous, tous ces motards, tous ces automobilistes, tous ces citoyens qui râlaient sur le prix du pétrole ? Non mais, franchement, pour qui vous vous prenez ! On n’a pas idée de critiquer ainsi l’ordre établi et le travail de nos merveilleux gouvernements, prêts à trouver les solutions les plus respectueuses de l’environnement pour le bien de l’humanité. Non, là faut que cela cesse. Vous devez faire de mauvaise fortune bon cœur. Reprenez vos chaussures, votre vélo, le train ou votre cheval et arrêtez d’être égoïstes. Il n’y a rien d’autre à faire de toutes façons.
Mode déconne off
Bon, maintenant qu’on a commencé avec du politiquement correct, parlons sérieusement. Tout d’abord un petit cours d’étymologie. Démocratie est très facile à décomposer, voilà un mot qui vient du grec ancien. Démos pour le peuple, considéré comme une communauté, et kratêo pour « je suis fort et puissant ». Donc la démocratie c’est la force du peuple. Il faut bien constater qu’elle est bien molle cette force pour le moment. Peut-être abruti par le travail et les bonnes émissions de divertissement, ce peuple en oublie de réagir… Sauf lorsque l’on touche à son portefeuille. Là, il se braque. Il y a un peu plus de 200 ans, c’était la famine qui provoquait des révolutions. Il faut dire aussi que le pouvoir en place, à l’époque, avait de la répartie. « Le peuple a faim, et bien qu’il aille manger ». De nos jours, la communication est plus terre à terre : « on a diminué les accises sur le Diesel de 0,00001 euro, voyez qu’on pense à vous » ou encore « moins vous roulez vite sur autoroute moins que vous coûtera l’essence ». Qu’ils se méfient ces beaux parleurs car motos, camions, voitures et citoyens frileux mécontents pourraient bientôt envahir le pavé… Pour s’en rendre compte, il suffit de tendre l’oreille aux conversations dans la rue et aux débats en ligne. Bref, d’écouter la voix du peuple.
Trop tard
Peut-être moins sourd qu’on le croit, le kern ministériel se réunit pour trouver une parade à la hausse du prix de l’essence, du gasoil et du mazout. La plupart des vroumeurs ont déjà trouvé la solution : diminuer les accises. Mais on doute fort que nos dirigeants viennent visiter le forum. Soit ! Il est clair qu’à l’échelle nationale, difficile d’influencer le cours du brut. Hormis un travail sur la taxation, pas grand chose à faire. Par contre, cette Europe chérie par de nombreux dirigeants aurait pu, si elle avait senti le coup venir, favoriser le développement de solutions alternatives à défaut de véritable réserves de pétrole sur le continent. Un chanteur disait un jour (Michel, si tu nous lis) : « ils ont le pétrole, on a les idées ». Ouaip, pas sûr, malheureusement. L’idée de génie qu’aurait dû avoir l’Europe était de plancher dès le début des années 80 sur de nouvelles solutions comme la pile à combustible ou le gaz. Comment ? En finançant la recherche, en préparant la réorganisation de l’approvisionnement de nouveaux carburants ou d’électricité, en mettant les constructeurs automobiles au défi et en motivant les citoyens à opter pour autre chose que le 100 % pétrole. À l’heure actuelle, seuls les constructeurs japonais proposent des solutions hybrides sur le marché. Peut-être que notre continent aurait pu avoir un statut de précurseur et ce serait tout doucement détaché des pétrodollars. Bienvenue à Utopia… Mais si on se décidait à faire bouger les choses. Vraiment !
UPDATE :
Le kern a décidé... de reporter la décision. Enfin non, ils ont décidé de mettre en place des groupes de travail afin de déterminer la façon de redistribuer le surplus de recettes lié à la hausse des produits pétroliers. Cette inertie est liée à des divergences de vue entre les partis de la majorité. En principe, c'est au Conseil des ministres du 9 septembre que tout se décidera. Notez bien cette date dans votre agenda ;-)
© Olivier Duquesne
Photo : © Shell