Décidément, les motards font l'objet d'un intérêt de plus en plus soutenu de la part de nos autorités, qui aimeraient bien faire baisser des statistiques qui nous sont plutôt défavorables. L’Institut Belge pour la Sécurité Routière a donc mené une étude approfondie en se basant sur les dossiers judiciaires de 200 accidents de moto graves ou mortels.

Cette étude (une "première" en Belgique!) a été cofinancée par le SPF Mobilité et Transports. Son objectif était de déterminer les facteurs causaux et aggravants jouant un rôle dans les graves accidents de moto survenus en Belgique, et d’identifier les situations types dans lesquelles se produisent ces accidents. Statistiquement, le motard court douze fois plus de risques d’être impliqué dans un accident mortel qu’un conducteur moyen de véhicule motorisé!

Trente-cinq

L'étude se fonde donc sur 200 accidents, dont 16% se sont produits en 2009 et le reste en 2010; la moitié d’entre eux étant mortels. Première constatation, et notre ego en prend un coup, dans 35% des cas, le motard se met au "tas" tout seul, dans la plupart des cas en virage, pêchant vraisemblablement par excès d'optimisme, que ce soit à propos de son talent à gérer une trajectoire ou un freinage, ou tout simplement à propos de sa vitesse, excessive.

Le reste est connu: collision avec un autre usager, une automobile en général, avec quelques schémas très constants. Tout motard s'est en effet déjà vu "couper la chique" par une voiture à un carrefour, mais beaucoup de motards se sont aussi retrouvés en difficulté lors d'un dépassement, lorsque le véhicule dépassé tourne sous son nez, et là, le motard n'est pas toujours très "correct" dans sa manœuvre! Mais lors d'un choc, le motard est toujours perdant: les occupants des voitures n'étant pas du tout blessés, ou très légèrement. Enfonçons le clou en précisant que dans la plupart des cas, l'automobiliste n'a pas vu arriver la moto, ou ne s'est pas rendu compte de sa vitesse. Rien de nouveau sous le soleil…

"Dimanche" toute la semaine

Plus intéressant, les lieux où se produisent les accidents, le moment où ils surviennent, et les "caractéristiques" des motards impliqués! 65% des accidents ont lieu hors agglomération, 70% sur une voie sans intersection et 11% à la hauteur d'un accès privé. Tordons le cou à l'idée reçue que le "motard du dimanche" se vautre le dimanche: 64% des accidents de moto ont lieu en semaine, 78% de jour, 62% entre avril et juillet. Ca n'étonnera personne, 98% des motards impliqués sont des hommes, et les 25-34 ans sont surreprésentés.

Messieurs les "vieux tromblons", ne vous croyez pas sortis d'affaire: Si vous vous (re)mettez à la moto sur le tard (maison payée, enfants partis…), vous garnissez généreusement les statistiques! Au niveau du permis, ça donne ceci: 8% des accidentés étaient des débutants, 44% étaient en possession d'un permis B obtenu avant 1989 (c'est pour vous, les vieux tromblons!) et… 17% roulaient sans permis valable (26% des conducteurs de motos sportives)!

Superbike

Parmi les motos impliquées, les sportives se taillent la part du lion: 35% des accidents, suivies par les Touring (21%), puis les "naked" avec 20% et les scooters (14%). Ce sont les customs (6%) et les trails (4%) qui risquent le moins! Si les motos sportives sont prisées par l’ensemble des catégories d’âge, trois jeunes conducteurs sur cinq en conduisent une, alors que seulement un motocycliste de plus de 45 ans sur cinq en pilote une! Les conducteurs de ce type de moto faussent visiblement les statistiques: les accidents avec une moto sportive étaient plus souvent des accidents impliquant un motocycliste seul que pour la majorité des autres catégories…

Plus désolant, l'alcool semble jouer un rôle certain: 20% des conducteurs testés étaient imlbibés! Ce n'est pas parce que vous partez en balade à Chimay qu'il faut en boire une, les gars! Alcool et conduite n'ont jamais fait bon ménage, à fortiori sur deux-roues!! L'état de nos chaussées semble n'intervenir que dans 10% des cas, par contre un tiers des motards tués sur la route ont percuté un arbre, un poteau ou un mur…

Leçons de morale

L'IBSR ne s'arrête pas à l'étude de ces tristes chiffres, mais propose aussi quelques recommandations, qui risquent de ne pas toutes plaire. Si des formations abordables et accessibles  et des campagnes pour sensibiliser les autres usagers envers les motocyclistes ne prêtent guère le flanc à la critique, tous les motards n'auront sans doute pas envie de se transformer en bonhomme fluo, casque compris! Il y a quelques années, on a obligé les motards à rouler phares allumés pour mieux les repérer dans la circulation.

Et maintenant, de quelle couleur devraient éclairer nos phares pour les discerner aux milieu des voitures qui roulent toutes phares allumés? Tant qu'on y est, tordons le cou à des slogans aussi niais que "Go for zero"! Pourquoi vouloir faire croire aux gens que la circulation est un monde de Télétubbies où l'on ne risque rien, comme sur les petites collines vertes peuplées de lapins et de fleurs bavardes? Et pourquoi stigmatiser les mauvais chiffres des motards? Tant qu'il y aura des accidents, et il y en aura toujours, le motard se fera toujours plus mal que l'automobiliste dans sa carapace Euro NCAP bardée d'étoiles (et d'airbags!)… Ca aussi, il faudra bien l'admettre une fois pour toutes!