Bruno Wouters

2 MAR 2010

Le flat ultime!

Paradoxale BMW HP2 Sport, née d'abord sur la piste, en 2007, où elle apparut sur la ligne de départ des 24h du Mans, avant de voir sa version routière présentée fin 2007. Les flats avaient déserté la piste depuis pas mal d'années, et il est réjouissant de voir le constructeur allemand se pencher sur son moteur emblématique et le proposer dans un écrin aussi désirable.

 La HP2 Sport est déclinée de la R 1200 S mais le patronyme "HP2" (HP signifie "high performance" et le "2" désigne le bicylindre à plat) exprime des motos particulières, développées par des passionnés travaillant dans une petite structure spécifique. Leur large expérience, leur savoir-faire personnel et leur "feeling" bénéficient des outils de développement et de toutes les possibilités techniques que BMW peut offrir pour élaborer un produit qui offre une symbiose entre haute technologie et démarche artisanale.

Ingrédients typiquement BMW

Résultat: des motos exclusives, et plutôt confidentielles. De la R 1200 S, la HP2 Sport hérite donc des suspensions caractéristiques de la marque, le flat est repris aussi, tant il symbolise aux yeux de nombreux passionnés les motos de la marque à l'hélice. Malgré les limites de puissance que ce type de moteur peut développer et ses inconvénients aérodynamiques, l'équipe en charge du projet a décidé d'en tirer toute la quintessence, et le flat, profondément modifié par rapport à la 1200 S, développe maintenant 130 ch à 8.750 tr/min et offre un couple maximal de 115 Nm à 6.000 tr/min. Son régime maxi atteint 9.500 tr/min. Il bénéfice pour ce faire d'une sérieuse adaptation, principalement au niveau des culasses. Celles-ci renferment dorénavant deux arbres à cames en tête qui actionnent des soupapes agrandies via des linguets.

Travail en profondeur

D'autres modifications, comme les conduits d'admission et d'échappement optimisés, les nouveaux pistons matricés et les bielles adaptées, expliquent aussi le surcroît de puissance que ce bicylindre affiche par rapport aux autres "Boxer". La transmission à rapport plus serrés hérite, et c'est une première sur une moto de série, d'un shifter. Cette technique permet de monter les rapports sans couper les gaz ni actionner l'embrayage. Inutile de vous dire qu'après y avoir goûté, on ne peut plus s'en passer! La partie cycle bénéficie de toutes les attentions. La suspension fait appel à des éléments Öhlins entièrement réglables, le freinage est confié à Brembo, avec des étriers monoblocs à quatre pistons montés radialement sur des disques de 320mm pour l'avant et un étrier flottant à double piston pour l'arrière. Conduites de frein en acier tressé et ABS en option (985 €) complètent le dispositif, une habitude chez le constructeur bavarois.

Finition à tomber

Le raffinement se niche partout, et l'on ne se lasse pas d'admirer les commandes aux pieds en alu fraisé, réglables en tous sens, le tête de fourche en alu fraisé aussi, les guidons-bracelets réglables, les leviers à maître-cylindres radiaux (réglables) estampillés Magura, la finition des éléments de carrosserie en carbone, le fin treillis du cadre ou les superbes roues. Le soin apporté à la conception et au choix des composants a permis de maintenir le poids à sec à la valeur estimable de 178kg, soit 199 kg en ordre de marche, tous pleins faits. La poupe à elle seule force l'admiration. Toute la partie arrière monopièce autoporteuse est réalisée en carbone et soutient l'échappement très dessiné. Sa fixation à la coque mérite le détour. Thermiquement découplée, elle compense les variations de longueur de l'échappement en fonction des variations de température. Le dosseret de selle est percé d'orifices d'aération qui évacuent très efficacement la chaleur dissipée par l'échappement.

Héritage génétique

L'implication de BMW Motorrad dans la compétition est sans doute aussi vieille que la marque elle-même. Plus proche de nous, la Boxer Cup a écumé de 1999 à 2004 la plupart des circuits Européens qui ont résonné du bruit caractéristique du boxer. 2007 a vu le retour d'une équipe officielle en course avec le flat. Ce banc d'essai ultime a permis de développer la HP2 Sport et de valider certains choix. Peu de choses différencient les deux motos: un système de changement rapide des roues, un réservoir de 23,5 litres à remplissage rapide, un Akrapovic Racing plus bruyant, et c'est à peu près tout. Après avoir détaillé la bête avec une attention sans limites, nous en prenons possession. Position sportive, certes, mais pas effroyablement radicale: la selle reste accessible au plus grand nombre, et le guidon ne se montre pas trop fatigant. Difficile de ne pas trouver sa place sur la HP2 Sport: tout se règle au milli-poil, position couchée naturelle, elle aussi. Seules ombres au tableau: les rétroviseurs brillent par leur remarquable inefficacité et les instruments de bord sont vraiment illisibles. Ils reflètent leur environnement, le compte-tours du type baregraph est inexploitable et la navigation dans les différentes fonctions malcommode. Franchement, on le démonterait bien pour remonter celui de la 1200S!

Le bonheur, simplement

Les premiers tours de roues rassurent, le moteur se montre conciliant et accepte de tourner à bas régime. Le couple, s'il culmine avec 115 Nm à 6.000 tr/min, offre déjà 100 Nm à 3.000 tr/min, avec une montée à 5.500 jusqu'au pic, un léger creux (110 Nm tout de même!) vers 6.500 tr/min et un deuxième pic à 7.500 tr/min pour redescendre doucement à 100 Nm vers 9.000 tr/min. Résultat: un moteur d'une disponibilité extrême, qui offre des reprises franches à tous les régimes. Il se montre puissant mais sans débordement de violence et son exploitation est un vrai régal, car il permet de s'amuser sans devoir le mener aux abords de la zone rouge. L'agrément sur route est indéniable, contrairement à beaucoup de sportives. La partie cycle, au diapason, donne une moto très à l'aise partout (bon d'accord c'est moyen en ville, encore que…!), saine et compréhensible. En augmentant le rythme, la moto dévoile sa vraie nature, celle d'une pistarde, travaillée pour un usage extrême. Bien aidée par des suspensions et un freinage au top, ce flat pour esthète n'apportera que des satisfactions: celle de posséder un bel et rare objet, l'assurance de pouvoir en tirer la quintessence sur la piste mais aussi sur la route, et ça, c'est bien plus rare! Le prix, très BMW (21.600 €), en deviendrait presque raisonnable tant cette moto est désirable!

 

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