François Piette

13 NOV 2006

Il va y avoir du sport !

BMW, spécialiste historique du grand tourisme est sans doute le seul constructeur a proposer aux amateurs du genre trois modèles bien distincts. Vaisseau amiral de la gamme, la vieillissante K1200LT n’a pour seule concurrente que la Goldwing. C’est le grand tourisme au superlatif, au prix d’un embonpoint malgré tout conséquent. Best seller de la catégorie, la R1200RT conçue sur la base de la 1200GS est la digne héritière des 1100 et 1150RT. Ces modèles représentent véritablement le mètre étalon du genre. La K1200GT apparue cette année hérite ses gènes de la K1200S et de la K1200R, qui ont ouvert une nouvelle page de l’histoire de la marque, et quelle histoire!

Pour rappel, la K1200R est aujourd’hui encore le roadster le plus «couillu» du marché avec ses 163 cv. La K1200GT en propose encore 152, pas mal pour du grand tourisme! La K1200GT reprend donc la mécanique et le châssis de ses sœurs, adoptant par la même occasion le monobras oscillant Paralever intégrant l’arbre de transmission et le sophistiqué Duolever a doubles triangles superposés qui remplace la classique fourche téléscopique. Là dessus se greffe un vaste carénage taillé à la serpe, intégrant l’incontournable bulle réglable électriquement et, une première dans le monde de la moto, un phare au Xénon (en option). Equipement pléthorique En réalité, seul le code est au Xénon, les grands phares sont confiés à deux classiques halogènes. Comme sur les autres BMW, l’ampoule code reste allumée lors du passage en grands phares. La route de nuit n’est plus une punition! Le réservoir de 24 litres fait regretter la contenance de la 1200 RT (27 litres), la selle conducteur est réglable en hauteur aisément. On l’eut appréciée un peu plus douillette. Latéralement viennent s’accrocher deux vastes valises, identiques à celle de la RT. Les couvercles peints couleur carrosserie risquent tout ce qu’ils peuvent, exposés qu’ils sont aux aléas de la circulation: l’ensemble en impose en largeur. Au-dessus du feu arrière un robuste porte-paquet peut accueillir différents topcases. Notre modèle d’essai était équipé du pack High Line, comprenant le phare Xénon, le réglage de suspension ESA, la selle et les poignées chauffantes, le cruise-control et l’ordinateur de bord. Ce pack de 1.770 € s’ajoute aux 17.950 € de la belle. Ajoutons-y pour faire bonne mesure un pare-brise haut à 61 € et le système d’alarme à 200 €, et nous arrivons à un total de 19.981 €. Quand on aime… Prévoyez encore quelques centaines d’euros pour le topcase de votre choix. Contrairement à ses sœurs ennemies les K1200LT et les R1200RT, la K1200GT n’a pas droit à la radio-cd. Pas grave, ce n’est pas notre option favorite! En route Mais trêve de discussions, passons aux sensations! Heureusement basse de selle, la K1200GT en impose malgré tout avec ses 300kg tous pleins faits, et les premiers tours de roues sont empreints de circonspection. La moto, lourde et large, souffre aussi d’une transmission «chaotique» à bas régime et à basse vitesse. Les à-coups s’atténuent avec un peu de pratique et de doigté, mais la K préfère des espaces plus dégagés que les encombrements urbains. Les GT étant taillées pour les longues distances et les grands espaces, nous décidons de l’emmener en cet été ensoleillé vers le Sud pour voir s’il y fait aussi chaud que dans notre petit royaume qui croûle, une fois n’est pas coutume, sous le soleil. Valises et topcase remplis jusqu’à la gueule, notre dévouée passagère derrière nous, nous taillons la route vers la Provence. Dommage que nous ne partons pas vers l’Allemagne, nous pourrions tracer à des vitesses que la morale (et les radars) réprouvent, tant chez nous que dans cette douce France qui nous accueille. Nous pourrions tenir indéfiniment des moyennes à plus de 200 km/h, avec des pointes à 220, 240 quand l’envie s’en fait sentir, bien à l’abri derrière le pare-brise dressé. Quel bonheur se serait de sentir cette moto autant dans son élément, de sentir avec quelle aisance elle pourrait maintenir ces vitesses, avec quelle facilité elle avalerait les grandes courbes sans jamais se désunir, qu’on règle les suspensions en position confort ou sport d’un simple mouvement du doigt, sans s’arrêter. Trans-Europe Express (vous vous rappelez? Kraftwerk...) Quel bonheur se serait de pouvoir exploiter sans fin cette provocante cavalerie ! Mais nous sommes en France, les radars et les flics sont nombreux, nous profitons du confort de conduite bien réel apporté par le cruise-control. Pas besoin de rouler les yeux rivés sur le compteur, pas besoin de garder la main droite crispée sur la poignée. La protection au vent offerte par l’ensemble carénage - bulle est efficace, pour le pilote en tous cas. Notre passagère est moins heureuse. La selle un peu trop longue l’empêche de se serrer contre son pilote favori, et si elle veut se reposer contre le topcase de 28 litres mis à notre disposition, elle se sent trop basculée en arrière et se prend tout le vent. Le confort de la selle lui convient parfaitement. Avis mitigé de notre passagère donc sur autoroute, contrairement à son conducteur, ravi de se retrouver aux commandes d’un véritable tgv sur deux roues. Mais l’autoroute n’est que le moyen le plus rapide d’arriver dans une belle région, pas une fin en soi. Et la Provence regorge de routes merveilleuses parsemées de villages charmants où il fait bon s’arrêter sous un platane et profiter du chant des cigales. Nationale 7 C’est sans doute ici que la BMW se montre la plus bluffante. Sur autoroute, on s’attendait en effet à la voir croiser à des vitesses stratosphériques, sur route on se demandait comment se comporteraient les 450kg de l’ensemble moto – pilote - passager. Eh bien, ça fait mal, très mal même à la concurrence ! Tout le confort d’une GT, avec l’aisance et le côté ludique d’un roadster sportif. Les virages et les courbes s’enquillent tranquillement en sixième, quel que soit le régime. La moto se balance d’un virage à l’autre avec facilité, et le moteur est toujours suffisamment rempli pour arracher l’ensemble hors du virage et le projeter à l’entrée du suivant. Une caresse à deux doigts et l’on s’engouffre dans la courbe qui se présente. Elle se resserre? Pas de problèmes, il suffit de freiner, le Duolever fait le reste. Des voitures devant vous? Une autre moto? Vous rentrez quelques rapports, et le tgv arsouille avec vigueur, et atomise à peu près tout ce qui roule, en complet contraste avec son grand pare-brise et ses valises, dans un confort royal. Cette moto, c’est du pur bonheur, du sport confortable, l’eau et le feu réunis! Tout n’est pas rose Des défauts ? Un seul, mais de taille ! Cette moto n’est pas sage ! Comment respecter les limitations avec une telle puissance et une telle efficacité réunies sur une même moto ? Difficile de rester sage à son guidon, très difficile, croyez nous! Le reste n’est que broutilles, hormis son prix, aussi impressionnant que ses prestations! Si vous craquez, il faudra sérieusement vous gendarmer, pour éviter que les gendarmes le fassent pour vous. Sinon, optez pour une R1200RT, une GT (presque aussi) efficace, mais qui a su rester plus raisonnable… © Bruno Wouters
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