« On peut vraiment rouler avec ça ? »… Ma stupéfaction a probablement dû rajeunir mon visage d’une dizaine d’années ! Lors de la présentation à la presse des nouvelles Alfa à Balocco, le centre de test du groupe Fiat, le staff italien a trouvé tout naturel de nous faire essayer les glorieux ancêtres dont il est souvent question, à savoir une Giulia TI Super et une Giulia GTA Stradale. C’est cette dernière que nous vous proposons de découvrir.

Quelle agressivité !

Du talent, les designers italiens en ont à revendre. D’une forme simplissime, la Giulia, dit parfois le coupé Bertone, dégage un charme fou. Une calandre ouverte, des traits droits cernés de courbes, une finesse toute latine qui s’applique à tous les détails et l’affaire est faite ! Un chef d’œuvre d’une logique esthétique implacable.

Cuisson à feu doux

« Le moteur est froid, je vais le faire chauffer », me glisse, sourire aux lèvres, le responsable des véhicules historiques. Il donne le contact, pompe à l’accélérateur pour remplir les deux gros carbus, démarre et… extase… Le 4 cylindres Alfa ronfle de cette voix métallique typique, reconnaissable entre mille. Les petits coups de gaz révèlent un volant moteur sans doute très léger et une absence totale d’inertie. Les parfums d’essence brûlée et d’huile chaude se marient pour titiller mes narines. Je succombe…

Fiche technique

En 1965, Alfa entend défendre sa réputation dans le championnat du monde des voitures de tourisme devant d’insolentes Ford et BMW. Les Giulia GTA (A pour « Alleggerita », allégée dans la langue de Dante) profitaient à ce titre d’un traitement tout particulier : carrosserie en alliage d’aluminium, moteur 1,6 l double arbre à double allumage délivrant jusqu’à 170 chevaux pour la course (Corsa) et trains roulants spécifiques.

Efforts d’allégement

Le poids, c’est l’ennemi ! Cette phrase bien connue a certainement été imprimée en version grand format devant la tête de l’ingénieur. Le volant à trou-trous, les poignées modifiées, les vitres changées pour du plexiglas, les sièges de type baquet, pas de doute, nous sommes bien face à une voiture pensée pour la course ! Même si notre version Stradale ne délivre « que » 115 chevaux…

Au volant…

Assis au volant, on (re)découvre avec joie les vieilles habitudes maison : le pédalier articulé au plancher, le levier de vitesse tourné vers le conducteur, la planche de bord en bois trouée de multiples compteurs, manomètres et autres thermomètres… Et puis ces commandes, directes, au feeling mécanique, ce léger tressaillement mécanique, cette sonorité métallique… Vite, en route ! Et inutile de forcer sur les muscles, hormis pour la direction à l’arrêt, la belle démarre en douceur avec un embrayage facile.

Chaud ?

Me voilà en piste, suivant l’instructeur aux commandes, pour sa part, d’une Giulia TI Super. Je crois rêver ! Le rythme augmente, je m’applique… Le moteur ne fait pas son âge. Quasiment un demi-siècle dans les bielles, mais une aisance incroyable à monter dans les tours. Très souple, il reprend dès les plus bas régimes pour entamer dès 3.500 tr/min un chant guerrier mêlant sonorité métallique de l’échappement et aspiration goulue des carburateurs. Pendant ce temps, ça pousse ! Fort même !

5 rapports !

Les rapports s’enchainent rapidement et avec précision. Premier freinage : là, l’Alfa rappelle son âge. Pas vraiment dans la puissance, très honorable grâce aux 4 disques, mais plutôt dans l’effort à déployer pour bouger cette pédale ! Après tout, beaucoup considèrent le sport auto comme une affaire d’hommes. Ça se mérite ! Je rétrograde et tente le talon-pointe pour soulager la mécanique. Mes chevilles manquent de souplesse, la tendinite me guette, mais ça passe.

Toujours plus !

Dans les virages, à la condition d’entrer doucement et sur les freins, l’Alfa présente un tempérament pousse au crime ! S’accrochant obstinément au bitume sur ses minces pneumatiques, la belle rappelle avec précision son niveau d’adhérence en crissant légèrement. La ligne droite en vue, j’ « ouvre » le volant et les gaz. Dans un léger survirage facilement contrôlable, Giulia se remet en ligne et repart à l’assaut de la courbe suivante ! Avec une masse inférieure à 800 kg, cette GTA est une ballerine que l’on s’amuse à faire danser d’un virage à l’autre… Et puis il y a ce moteur…

Intouchable

Vous voulez une Giulia GTA ? Bonne chasse… Si c’est une authentique que vous recherchez, armez-vous d’un expert et d’un solide compte en banque : la bête est rarissime, très souvent copiée et vaut son pesant de cacahuètes : environ 150.000 € pour une version « Stradale » et bien plus pour une « Corsa » ! Revenons sur terre : vous trouverez de très beaux coupés Bertone de série, parfois préparés dans l’esprit des GTA de l’époque pour environ 30.000 €. Ce qui n’est déjà pas rien.

Conclusion

La magie Alfa a opéré. Le bruit, les sensations, les odeurs, les formes… Je suis envoûté ! Si cette inaccessible GTA est passée telle une chimère dans ma vie, je n’en reste pas moins amoureux. Allez expliquer cela à ma chère et tendre… Comment ? Vous savez ce que c’est ?