Bruno Wouters

19 JAN 2013

L'éloge de la simplicité!

Je vous parle d'un temps que les moins de quarante ans ne peuvent pas connaître: les années '70, bénies des motards, terres d'exploits du Joe Bar Team! En ce temps là, si certains motards pouvaient rêver à des 750 voire quelques 900cc, la plupart se contentait de cylindrées bien plus modestes, et le marché faisait la part belle aux légères trails bikes nées aux Etats-Unis. Ces petites motos tout-terrain polyvalentes et soigneusement équipées connurent un formidable succès: aussi à l'aise en ville que sur les chemins, elles étaient loin de se montrer ridicules sur la route. Honda déjà se démarquait de la concurrence, ayant présenté en 1972 la XL 250 Motosport, un trail quatre temps à quatre soupapes, le premier monocylindre de ce type produit en grande série. 

Véritable gueule d'amour, il connut un joli succès et ne fut sans doute pas étranger à la présentation en 1975 de la mythique Yamaha XT500 qui reprenait la même recette. Il est difficile aujourd'hui de mesurer l'impact qu'ont eu de telles motos! Pourriez-vous croire que la 500XT, tout menue, toute fluette aujourd'hui, passait pour une vraie moto d'homme, virile et exigeante? Les temps ont bien changé et une moto de 500cc est considérée maintenant comme une petite moto, alors vous pensez bien, une 250…

La 250 CRF de Honda, sans jouer un instant la carte de la nostalgie, apporte un vent de fraîcheur et de simplicité bienvenu dans le paysage morose du marché de la moto, et résume à elle seule assez bien une situation paradoxale. La moto utilitaire est morte en Europe à l'aube des années soixante, mais la naissance de la moto de loisir eux Etats-Unis à la même époque a fait éclore chez nous un nouveau marché.

La fin d'un cycle

Les japonais ont pris toute la place avec des motos fiables et attractives, la moto devenant un objet de loisirs et de passion. Ce marché disparaît doucement maintenant, les motards des années 60-70 vieillissent et, si les ventes de belles motos statutaires se portent bien, le marché vit malgré tout une solide crise. On croit, à voir les chiffres d'immatriculation, les japonais à l'agonie. Il n'en est rien!

Si les marchés US et européens crisent, les marchés émergeants réclament des millions de deux-roues, mais pas les mêmes! Et les japonais, hésitant à investir pour des produits prisés par les seuls européens, inondent ces nouveaux marchés avec des petites cylindrées basiques et économiques mais pas tristes pour autant, comme cette CRF produite en Thaïlande et vendue chez nous 3.990€!

Comme une grande

En souvenir de nos jeunes années, nous n'avons pas pu résister à la tentation de partir à son guidon. Le style, flatteur et bien dans l'air du temps, montre une finition soignée. Les recettes utilisées restent pourtant simples. Cadre en acier, bras oscillant en alu, fourche inversée non réglable, mono-amortisseur Pro-Link (monté sur biellettes), deux freins à disques, monocylindre refroidi par eau issu de la CBR: pour le prix, reconnaissez que vous n'êtes pas volé, d'autant que du côté look, la filiation avec les sportives CRF-R flatte l'ego.

Pas de regrets non plus en détaillant de près la moto, c'est de la belle ouvrage, du propre et du soigné. Au guidon, la position TT ne surprendra pas les habitués du genre: selle longue et étroite, guidon large, de quoi affronter tous les terrains avec sérénité.

La route, autrement

Le contrôle de la moto, facile, nous confirme combien Honda a toujours été attentif à rendre évidente pour tous la prise en mains de ses motos. Si le 250, plein de bonne volonté, ne développe pas une puissance réclamant Traction Control et cartographie paramétrable, il emmènera cette petite moto légère (144kg) avec facilité. Se faufiler en ville est un régal, et on snobe naturellement les autoroutes et les voies rapides pour redécouvrir les joies de la campagne, un terrain de jeu ou la CRF excelle.

Le moteur et la boîte six s'accommodent pour rendre la conduite amusante et en même temps paisible, et on se surprend à goûter plus qu'à l'accoutumée au paysage qui nous entoure, avec des pneus qui se montrent à l'aise aussi sur les petits chemins que vous prendrez le temps de découvrir.

Eloge de la simplicité

Certes, tout n'est pas parfait, avec un accueil pour le passager qui ne donnera pas beaucoup envie de partager la balade, une selle un peu haute et étroite qui ne procure pas le meilleur confort, et un tableau de bord réduit à sa plus simple expression. Une version plus "seventies", plus "scrambler" séduirait-elle plus? Elle proposerait sans doute une assise plus confortable et plus basse, sans enlever la moindre parcelle de plaisir de conduite.

Plairait-elle aux marchés émergeants et aux jeunes occidentaux? C'est une autre question! Toujours est-il que nous avons prix énormément de plaisir à pratiquer cette petite CRF et si nous avons dans doute pris (un peu) plus de temps à rejoindre la capitale depuis notre lointaine province picarde, nous pouvons vous assurer que avons pris bien plus plaisir à parcourir les petites routes à son guidon qu'à celui des nombreuses machines bien trop puissantes, qui seules semblent trouver grâce à nos yeux d'Européens nantis!

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