L'idée séduit, les Guzzi offrant, depuis l'apparition des premières Breva, des alternatives valables, et non dénuées de caractère, à la production habituelle. Se frotter à la GS représente un fameux challenge, voyons ce qu'il en est. Comme BMW pour la GS, Guzzi a choisi de travailler un style plutôt high-tech, laissant la part belle aux organes mécaniques. Un cadre double poutre en acier met en valeur la caractéristique architecture moteur chère à la marque transalpine, seule à proposer son V-twin en position face à la route, depuis la V7 des années '60.

V-twin face à la route…

Cette architecture est devenue indissociable de l'image de Guzzi, tout comme le flat twin colle à la peau de BMW! Ces moteurs affichent une réelle personnalité, et influencent directement le style des motos qui les portent. Tant mieux, un peu d'originalité ne nuit pas, au contraire! Le reste du travail esthétique nous convainc moins. Le garde-boue avant est taillé à la serpe. L'anthracite du bloc optique, sensé mieux digérer les attaques de la pierraille errante, n'allège pas la proue de la moto, le feu arrière LED paraît bien massif, lui aussi, et que dire du pot, énorme, sans l'originalité de celui qui équipe la Griso! L'ensemble cadre – moteur - transmission méritait mieux à notre avis, mais des goûts et des couleurs… Un habitué des gros trails routiers trouvera rapidement ses marques en prenant le guidon de la Stelvio. Les autres seront, comme chaque fois, surpris par le gabarit imposant de ce type de motos. La selle ajustable de 840 à 820mm, le pare-brise réglable en hauteur, la boîte à gants verrouillable, le porte-paquets, l'ordinateur de bord, les jantes à rayons montées en Pirelli Scorpion Tubeless, Guzzi n'a pas mégoté sur l'équipement.

…Plein de caractère

Nous disposions en prime de poignées chauffantes et de valises latérales, histoire de souligner encore les aptitudes routières et voyageuses de la bête! Le premier coup de démarreur donne le ton: le twin met un peu de temps à tourner bien rond, il lui faut quelques dizaines de secondes pour répondre aux premières sollicitations de la poignée de gaz. Celles-ci feront gentiment osciller la Guzzi sur son axe longitudinal, la rançon du couple de renversement bien présent! Nous retrouvons avec plaisir le caractère de la Griso 8V, un twin remarquablement rempli dès 2.000 tr/min, permettant de manier la moto avec sérénité jusqu'à 5.000 tr/min, régime où il se déchaîne pour grimper avec une vigueur réjouissante vers la zone rouge. Un merveilleux caractère, de vraies sensations. Facile bas dans les tours, et remarquablement puissant si nécessaire. Les quatre soupapes supplémentaires ont transfiguré ce moteur, en le dotant d'une double personnalité et d'un caractère attachant, même au niveau des vibrations.

Dévoreuse de kilomètres

Bien présentes, bien maîtrisées et donc jamais gênantes, elles participent au plaisir généreusement distillé par une mécanique remarquablement secondée par une transmission sans reproche, avec un cardan plus agréable que ceux de BMW! Le châssis, parfaitement secondé par les suspensions, permet d'exploiter les performances du moteur sans arrière pensée. Le confort, plus sec que celui de la GS, reste malgré tout d'un excellent niveau, la carrosserie apportant sa pierre à l'édifice avec une protection convaincante, hormis peut-être pour les mains et les pieds. Parlons-en des mains! Elles bénéficiaient sur notre Stelvio de l'apport de poignées chauffantes, efficaces, certes, mais à la commande via l'ordinateur de bord insupportablement compliquée! Tenue de route excellente aussi, mais la Stelvio, comme beaucoup d'autres, est sensible au port des valises qui la feront flotter à haute vitesse. Rien de rédhibitoire, ceci n'apparaîtra qu'à vitesses (très) soutenues sur les autobahns, mais une Béhème se comporte mieux dans ce cas de figure. Au chapitre des freins, on voit apparaître l'ABS, évident sur ce type de moto. L'équipement de qualité (pinces Brembo à quatre pistons apposés à fixation radiale) ne laisse pas un souvenir impérissable, il remplit son office, mais ne marque guère les esprits.

Rouler autrement

Guzzi sort des motos de plus en plus abouties, et convaincantes. Si la Stelvio n'atteint pas encore la qualité de prestations de la BMW, elle s'en approche toutefois nettement. Et si objectivement elle reste encore un cran en deçà, subjectivement elle pourrait faire pencher la balance en sa faveur. Grâce entre autres à son moteur, pas vraiment plus performant mais sans doute plus vivant et attractif à l'usage, grâce à un cardan aux réactions plus discrètes que celui de l'Allemande, grâce à un nom qui en fera rêver certains, en dépit d'un réseau encore à construire et d'un prix qui s'aligne sans vergogne sur celui de sa concurrente, 13.990€, trop cher pour damer le pion à l'impériale BMW.