Heureusement, ces mêmes constructeurs proposent tous – ou presque – dans leur gamme une alternative très intelligente : les gros trails. Plus abordables financièrement, plus légers et plus polyvalents, à peine moins confortables, ils vous emmèneront aussi loin que les GT, pour peu que vous acceptiez leur esthétique parfois rebutante et leur selle souvent un peu haut perchée.
Bicylindre
Apparue en 2002, la DL1000 V-Strom reprend le bicylindre issu de la TL1000 et décliné sur de nombreuses machines dont la SV1000. Il développe ici 98 ch à 7600 tr/min pour un couple de 101 Nm à 6400 tr/min. Le modèle 2005 affiche un cadre dorénavant paré de noir, mais ne propose guère d’autres évolutions. En avait-elle d’ailleurs vraiment besoin ? Suzuki nous avait concocté dès 2002 un trail très abouti. Au premier abord, son esthétique assez neutre, bien dans la veine d’une Honda Varadero ou d’une Aprilia CapoNord, ne choquera pas les amateurs du genre. Pour plus d’originalité, jetez plutôt un œil chez BMW ou KTM !
Facile
Les premiers kilomètres parcourus vous confirmeront que vous pilotez une japonaise. Rien à dire, tout tombe sous la main ou le pied (après un petit réglage du guidon et du sélecteur ! c’est fou comme un ajustement des commandes peut changer la vie à bord…), commandes douces, réactions policées. Un plaisir, pour autant que vous ayez les jambes assez longues : la selle est plutôt haute !
Le moteur n’affiche pas tout à fait le même caractère que sur la SV1000. Il semble plus rugueux. Moins effacé, il affiche plus de personnalité, et moins de bonne volonté à bas régime. Si dans les petits rapports il accepte, sans trop apprécier, de reprendre sous les 3000 tr/min, dans les rapports supérieurs il cogne furieusement jusqu’à 3500 tr/min, voire plus en sixième. Il faut dire à sa décharge que la moto tire long. La sixième est un véritable overdrive, le tableau de bord l’affiche fièrement au passage du rapport par un explicite « O/D ». On se demande à cette occasion pourquoi il se contente de cet « O/D » sur le dernier rapport, et qu’il n’indique pas un chiffre de 1 à 6 en fonction de la vitesse engagée, ce qui permettrait au pilote de savoir où il en est.
Adaptez votre vitesse
La DL1000 serait sans doute plus alerte avec une démultiplication finale plus courte, mais pour voyager loin, il est bien agréable de constater qu’à 4000 tr/min vous filez déjà à 120 km/h (zone rouge à 9500 tr/min). Résultat, une consommation de 6,5 l aux 100 km en tenant une moyenne de 130, à deux sur la moto, avec top-case et sac ficelé sur ce dernier. Avec un réservoir de 22 litres, vous pourrez parcourir plus de 330 km sans vous arrêter. Si vous n’êtes pas sages ou que vous décidez de rendre visite à votre vieille tante qui habite en Allemagne, votre moyenne horaire oscillera sans problème entre 160 et 200 km. Mais vous vous arrêterez plus souvent, la consommation se stabilisant dans ce cas aux environs de 8,3 litres aux 100 km, ce qui vous fera des étapes environ 80 km plus courtes. Pied lourd ou pied léger, pardon, poignée essorée ou caressée serait plus exact, faites votre choix, sachant que la DL1000 excelle dans les deux exercices.
On fait la course ?
Le passager a d’ailleurs autant apprécié son voyage en V-Strom que d’autres effectués en GT. Douillettement installé, bien calé par le top-case de 48 litres qui équipait notre machine d’essai, il apprécia tout autant le confort de la moto que la vigueur du moteur qui déleste allègrement la roue avant lors de démarrages un peu pressés. Une Mercedes SL55 AMG de 500 ch s’en souvient encore pour être restée derrière la Suzuki lors d’un Grand Prix des feux rouges mais, chut, ne le répétez pas…
Confort
Reine de l’autoroute, loin d’être ridicule en performances, la DL1000 V-Strom laisse apparaître un châssis très sain et équilibré. Les suspensions offrent un débattement favorable à un excellent confort tant pour le pilote que pour le passager, qui bénéficient tous deux d’une selle au moelleux bien adapté. Ces suspensions fournissent aussi un excellent travail, même à rythme soutenu, rendant la V-Strom presque sportive. Le châssis périmétrique en aluminium accepte en effet une conduite agressive sans se désunir. Tout au plus lui reprochera-t-on de ne pas avoir un freinage inoubliable. Entendons-nous bien : les freins remplissent très correctement leur office, mais ne laisseront pas un souvenir marquant. Au même chapitre, on déplorera que Suzuki n’ait pas encore jugé utile d’équiper son trail « amiral » de l’ABS, même en option. Sans doute pour plus tard, mais c’est dommage par rapport à la concurrence…
Appréciable
En complément du confort première classe du châssis, la Suzuki offre une excellente protection pour ses occupants. La bulle protège bien le torse, et la carrosserie les jambes. Des protège-mains mettront vos petites menottes elles aussi à l’abri des frimas et des intempéries. La V-Strom vous emmènera loin, et sans fatigue.
L’équipement est plutôt complet, avec warning, appel de phares, double trip, clé codée. Il y a de la place sous la selle : nous y avons engouffré un U, une chaîne et un bloque-disque, mais pour plus de facilité il nous a fallu déposer à chaque fois le top-case avant d’ouvrir la selle. Manœuvre très simple, heureusement, mais irritante à la longue ! Le top-case aurait dû être positionné 2 ou 3 cm en arrière pour ne pas gêner l’ouverture de la selle. Regrettable aussi de devoir piocher dans le catalogue des accessoires pour obtenir une béquille centrale, pourtant indispensable sur ce genre de moto. La V-Strom sera vôtre moyennant un chèque de 9299 €, ce qui paraît très correct au vu des remarquables prestations et de la réelle polyvalence de cette machine.
© Bruno Wouters