Olivier Maloteaux

29 NOV 2024

Essai : Toyota Land Cruiser, un cube taillé pour l’aventure

La nouvelle génération du « quat’quat’ » Toyota nous revient relookée et embourgeoisée, tout en jurant ne pas être devenue pantouflarde pour autant. Vérification lors d’un road-trip marocain alternant route et tout terrain.

"Le Land Cruiser reste plus rustique qu’un SUV, fort cher et pas vraiment nécessaire chez nous. Mais avec cette voiture, vous achetez de l’aventure en cube !"

Le « Land », c’est la plus vieille des Toyota. Le modèle est né en 1951 (mais n’a été baptisé Land Cruiser qu’en 1954) et a survécu jusqu’à aujourd’hui. Il a été vendu à plus de 10 millions d’unités, au gré d’une flopée de générations divisées en trois branches familiales : Heavy Duty (versions robustes typées utilitaires, destinées aujourd’hui aux marchés d’Afrique, du Moyen-Orient et du Pacifique), Station Wagon (variantes les plus grandes, typées SUV à l’américaine) et Light Duty (modèles intermédiaires visant le compromis entre confort et tout terrain). C’est de cette dernière branche qu’est issu le Land Cruiser qui nous occupe (nom de code 250), le seul encore vendu en Europe (sur d’autres marchés, ce nouveau modèle a aussi un jumeau badgé Lexus : le GX). Pour voir s’il est digne de l’héritage familial, nous avons lancé ce nouveau Land Cruiser dans un road-trip cassant au cœur des montagnes marocaines.

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Design

Une brique posée sur…

Ce Land Cruiser Série 250 est plus grand que son devancier (+10 cm, soit 4,92 m), mais aussi nettement plus large (+9,5 cm, soit 1,98 m hors rétros) et plus haut (jusqu’à 1,93 m avec les barres de toit). Ce qui flashe surtout, c’est le changement look : aux rondeurs de l’ancien Land Cruiser, le nouveau préfère des lignes cubiques au charme néo-rétro, piquant quelques traits de style à différents ancêtres de cette grande famille. Chacun ses goûts, mais selon nous, ce petit air de brique finement taillée est plutôt agréable à regarder. Plus de logo Toyota sur la calandre, mais le nom de la marque est désormais gravé en lettres capitales. On remarque aussi que ce Land ne porte pas sa roue de secours sur le dos mais la cache sous son coffre. Et cette nouvelle génération n’est disponible qu’en version longue à 5 portes et plus en courte à 3 portes.

On précisera encore que cette grosse Toyota se chausse en 18 ou 20 pouces et place des bavettes devant ses roues avant pour réduire le flux d’air venant frapper les pneus et donc améliorer (un petit peu…) le coefficient aérodynamique de ce gros cube. Les plus observateurs noteront aussi que les nouveaux Land Cruiser n’ont pas tous le même regard : les feux avant à LED sont soit rectangulaires, soit ronds. Mais vous ne trouverez les yeux ronds qu’en occasion car ils ne sont montés que sur la série First Edition malheureusement déjà sold-out… En plus des rails de toit, le Land Cruiser peut se parer d’un large éventail d’accessoires de carrosserie, comme des marchepieds latéraux, pratiques pour grimper plus facilement à bord de ce bestiau.

…une échelle

Sous sa nouvelle robe, ce Land Cruiser Série 250 cache le squelette de son grand frère Station Wagon Série 300 (non vendu chez nous), à savoir la plate-forme TNGA-F, avec châssis en échelle sur lequel est posé la carrosserie (c’est plus costaud en cas de gros choc que la coque autoportante des voitures traditionnelles). Par rapport à l’ancienne, cette nouvelle poutre portante a été sensiblement rigidifiée (+50% de résistance à la torsion). Les trains roulants restent typés costauds plutôt que routiers, avec un pont arrière rigide. La direction s’équipe pour la première fois d’une assistance électrique (et plus hydraulique), qui autorise le montage de nouvelles aides à la conduite, comme le maintien de voie et le suivi des bandes de circulation. On verra plus loin que ce Land Cruiser dispose aussi d’autres aides spécifiques à la conduite tout-terrain.

Expérience

Solidement assemblé

On ne monte pas à bord d’un Land Cruiser, on y grimpe. D’où l’intérêt des marchepieds latéraux optionnels. Dans l’habitacle, on surplombe les autres véhicules d’une bonne tête et on apprécie aussi la ceinture de caisse plus creusée qu’avant, offrant une meilleure visibilité latérale. Selon le niveau de finition, les passagers sont assis sur des sièges en tissu, similicuir ou cuir véritable. À l’avant, on a les coudées franches et le mobilier semble très solidement assemblé, mais se couvre de nombreux plastiques durs, nettement moins raffinés que ceux des SUV premium pourtant affichés au même prix ou presque… Et certaines gâteries manquent à l’appel, comme par exemple les sièges avant à fonction massage. Pour le reste, tous les équipements de confort sont présents, y compris les sièges avant chauffants et ventilés. Un toit ouvrant est également proposé (3e niveau de finition), de même qu’un toit panoramique vitré mais non ouvrant (4e niveau de finition).

Un cube à 7 places

À l’arrière, l’espace pour les jambes est généreux, mais l’assise est fixe (pas de réglage en longueur). Les dossiers (fractionnés 1/3-2/3) sont inclinables, mais ils sont peu galbés et maintiennent donc peu le corps. Et le tunnel central assez marqué est gênant pour le passager du milieu. À partir du 3e niveau de finition et pour 1.090 € de supplément, deux strapontins peuvent prendre place dans le coffre. Ces sièges additionnels n’étaient pas montés sur notre véhicule d’essai et on ne peut donc pas vous dire s’ils sont confortables.

Coffre vaste, mais haut perché

En configuration 5 places, le coffre est spacieux (mais son seuil est haut perché, comme toujours sur les vrais 4x4) et on y accède via un hayon, éventuellement électrique et avec lunette à ouverture séparée (dès le 2e niveau de finition) pour glisser plus facilement de menus objets dans la soute. Les sièges du deuxième rang se rabattent classiquement (dossier uniquement) ou en portefeuille (dossiers et assises, pour obtenir un plancher de chargement bien plat).

Baroudeur à l’ère digitale

Plus de classiques cadrans à aiguilles pour le Land, mais un combiné d’instruments numérique (de 7 ou 12,3 pouces selon le niveau de finition). Au centre, on a droit à un écran tactile (de 9 ou 12,3 pouces), qui commande un système multimédia à jour, sans plus. On apprécie la présence d’une floppée de boutons physiques à l’ancienne (pour la clim’ notamment), ce qui permet de piloter les commandes même avec de gros gants, voire avec les mains pleines de boue... Mais il y a ici trop de touches et on s’y perd un peu, l’ergonomie n’étant pas le point fort du modèle : il est par exemple compliqué de débrancher les nombreuses assistances électroniques à la conduite. On peut heureusement faire appel à la commande vocale pour gérer plus facilement certaines fonctions de bord.

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Conduite

Du gazole sinon rien

Contrairement au Mercedes Classe G et (bientôt) au Range Rover, le Land Cruiser ne se convertit toujours pas à la propulsion électrique. Sous son capot, le diesel reste roi, sans autre choix (du moins chez nous car ce Land Cruiser existe en version hybride essence/électricité aux Etats-Unis). Ce nouveau modèle reprend le bloc 2.8 litres à 4 cylindres bien connu de l’ancien Land Cruiser et du pick-up Hilux. Un moteur increvable, affichant ici 204 ch et 500 Nm de couple. Ce n’est pas de trop pour animer ce bestiau de 2,5 tonnes. Les performances sont donc juste correctes, avec un 0 à 100 km/h bouclé en 12 secondes et une vitesse de pointe de 170 km/h.

Micro-hybridation en approche

Au démarrage, ce bouilleur à mazout ne peut cacher son mode d’alimentation : il grogne et claque un peu. Il vibre aussi à certains régimes. Un moteur assez rugueux, qui se passe pour l’instant totalement d’électrification, mais recevra l’an prochain une micro-hybridation 48V pour consommer un peu moins. Ceci dit, l’appétit est correct : nous avons relevé entre 7,2 l/100 km en conduite très calme et 13,5 l/100 km lors de notre parcours tout-terrain. Ce diesel est associé à une nouvelle boîte automatique à 8 vitesses (toujours fournie par le japonais Ainsi-Warner), plus réactive que l’ancienne unité à 6 rapports. Le convertisseur de couple mouline néanmoins toujours sous forte accélération (comme si on ne lâchait pas totalement l’embrayage tout en accélérant). Mais c’est pour mieux ramper sans à-coup en conduite tout-terrain…

Dans l’Atlas marocain

Le Land Cruiser est taillé pour l’aventure et le constructeur nous a proposé de le découvrir sur les pistes du Maroc, au sud de Fès. Notre essai débute sur des routes bitumées mais assez fracassées. Dès les premiers mètres, le pont arrière rigide se rappelle à notre souvenir : il fait sautiller le train postérieur. On ne retrouve pas ici le toucher de route moelleux d’un Range Rover ou d’un Land Rover Discovery à suspension pneumatique (contrairement à l’ancien, le nouveau Land Cruiser n’a étonnamment plus droit à une suspension à air). Et en virage, les mouvements de caisse sont aussi beaucoup plus marqués qu’à bord d’un SUV, tandis que la direction est moins précise. Mais ce côté rustique a son charme : on ressent bien la route et cela sans la subir car le confort général reste finalement très correct.

Prêt à tout affronter !

Un coup de volant à droite et nous quittons le tarmac pour une piste en caillasse qui grimpe vers les sommets du Moyen Atlas. Plus c’est cassant, plus le Land Cruiser devient confortable et se sent dans son élément. À son volant, on affronte les trous et cailloux sans craindre de tomber en rade, grâce à une généreuse garde au sol et un squelette qui encaisse les coups. Seuls les pneus risquent de faire fusible dans ce milieu hostile. Mais les gommes de série Dunlop All-Terrain ne craquent pas vite et adhèrent bien sur tous les chemins, aidés par la transmission intégrale permanente (répartition du couple de base avant/arrière de 40/60%).

Des aides au tout-terrain

Cette transmission intégrale se complète d’un blocage des différentiels central et arrière (pour éviter qu’une roue ne se mette à tourner dans le vide par manque d’adhérence), mais aussi d’un réducteur (gamme de vitesses courtes) pour grimper aux arbres. Pour mieux gérer le dosage des gaz et la progressivité de la boîte de vitesses, Toyota propose le programme « Multi-Terrain Select » (à partir du 3e niveau de finition) qui permet, via un bouton rotatif, de sélectionner les modes Boue, Sable, Terrain rocailleux, Poussière, Neige profonde ou le nouveau mode Auto. L’électronique adaptant la voiture à la situation. Quant à la fonction Crawl Control, elle module automatiquement la progression au pas sur les fortes pentes ; une sorte de cruise-control de l’extrême (de 1 à 5 km/h) qui fonctionne en montée comme en descente : plus besoin de s’occuper des gaz ni des freins, il suffit de tourner le volant. Et quand cette Toyota risque vraiment de se casser les dents, on peut désacoupler sa barre stabilisatrice avant (une nouveauté sur le Land Cruiser 2024, disponible seulement sur le plus haut niveau de finition), pour gagner quelques centimètres de débattement de roues. De nouvelles caméras panoramiques permettent aussi de garder à l’œil le moindre recoin de l’engin et même de voir ce qui passe sous ses roues. Bref, le nouveau Land Cruiser n’a pas juste le look de l’aventurier, mais il en a conservé l’esprit et les capacités. Testé et approuvé !

Prix

Prix Toyota Land Cruiser 2024

Là, ça pique un peu. Le Land Cruiser débute à 77.020 €. Et cette version de base est peu équipée. Vu que les options ne sont pas disponibles à la carte, il faut monter en gamme pour une dotation digne de ce nom, avec des prix qui grimpent alors entre 85.370 et 96.900 €. Ok, ça reste moins cher que l’affolant Classe G de Mercedes à plus de 125.000 €, mais c’est le prix d’un Ford Bronco nettement plus puissant (2.7 V6 de 335 ch) ou d’un Land Rover Discovery, plus raffiné (diesel à 6 cylindres, suspension pneumatique) et tout aussi capable en TT. Le Toyota se distingue toutefois par sa fiabilité proverbiale et une garantie de 10 ans/185.000 km. A voir si cela suffira. De toute façon, Toyota ne compte pas en vendre trop en Europe, car la marque pourrait alors… perdre de l’argent : le Land Cruiser émet tellement de CO2 (de 275 à 281 g/km !) qu’il ferait gonfler le taux moyen de la marque, avec de lourdes amendes européennes à la clé. Bref, en Europe, c’est avant tout un véhicule image. C’est sur les autres continents qu’il fera carrière.

Verdict

On l’aime ou on ne l’aime pas ; nous, on l’adore ! D’accord, bien que cette nouvelle génération se soit embourgeoisée, le Land Cruiser reste plus rustique qu’un SUV (moteur rugueux, suspension parfois sautillante), fort cher (y compris en taxes) et pas vraiment nécessaire chez nous. Mais avec cette voiture, vous achetez de l’aventure en cube. À travers lui, on devine des montagnes et des dunes. Certes, sur notre bitume quotidien, on n’exploitera pas toutes ses capacités (pas plus que celles d’une super sportive, d’ailleurs…), mais il a une présence rassurante. Une force tranquille qui nous permet de rêver plus loin que les bouchons du quotidien. Oui, à sa façon, cette Toyota est une voiture de rêve…

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