Présentation

Cela faisait quasiment 40 ans que la ligne de la XJ n’avait pas évolué. Gracile, bondissante, d’un remarquable équilibre et d’une sportivité subtilement dissimulée, elle fût longtemps considérée comme un chef d’œuvre de classicisme. Pour la nouvelle mouture, Jaguar jette les traditions aux oubliettes ! De sportivité, il en est plus que jamais question ! Pourtant, difficile de faire l’unanimité : la partie arrière paraît assez impersonnelle et la face avant en impose avec sa calandre en forme de… soupirail ! Je m’excuse profondément auprès des amateurs de la marque, mais là, j’avoue avoir un peu de mal ! En revanche, le pavillon est d’une remarquable fluidité… Mais impose une contrainte : la visibilité arrière est réduite ! Mais sous cette robe massive se cache un cœur léger : en usant de l’aluminium et de matériaux recyclés, Jaguar est parvenu à procurer une rigidité et une légèreté incomparables à sa limousine ! Ainsi, Jaguar est fier d’annoncer que la masse totale de sa berline est de minimum 150 kg inférieure à celle de ses concurrentes.

Moteurs

Ce sont deux motorisations que nous avons pu tester : le raisonnable V6 diesel et le nettement plus démonstratif V8 S/C de plus de 500 chevaux !

La précédente XJ avait inauguré le diesel : plutôt « shocking » pour les Britanniques, mais indispensable pour la survie de l’espèce. D’autant qu’il s’agissait d’un excellent V6 diesel, mais probablement trop calme, avec sa puissance tout juste supérieure à 200 chevaux. Cette fois, la XJ attaque avec du lourd : un V6 de 3 litres et affichant 275 chevaux ! Raffiné, ce moteur s’ébroue avec une discrétion qui sied bien à cette grande Lady. Mais cette discrétion n’est qu’auditive car de punch, il en est question ! Et pour cause, 600 Nm, ça cause ! Sa voix feutrée et raffinée fait oublier qu’il s’agit d’un diesel quand sa puissance n’hésite pas à faire plonger les passagers dans le fond de leurs sièges !

Avec le V8 essence Supercharged, on entre dans un autre monde. D’une cylindrée de 5 litres, ce moteur ne délivre pas moins de 510 chevaux et 625 Nm aux roues arrière ! Traduction, ça décoiffe : le 0 à 100 km/h est avalé en 4,9 secondes ! Ainsi paré, le fauve montre les crocs, rugit gravement et catapulte cette longue berline à des vitesses inavouables ! La sensation est surprenante : avec sa voix de baryton, ses explosions à l’échappement et sa poussée démentielle, on a peine à croire que l’on tient une limousine entre les mains et les pieds !

Dans les deux cas, c’est ZF qui fournit la boîte de vitesses à 6 rapports. Et ? Ben c’est superbe. Vraiment. Réactivité, intelligence, promptitude en modes manuel et sport, elle vous donne tout !

Comportement routier

Les ingénieurs l’ont annoncé, la berline de grand-père destinée à faire le tour des antiquaires, c’est fini. Cette fois, on pourra même s’amuser à l’occasion sur parcours sinueux ! En souplesse bien entendu, standing oblige. Et de fait, la XJ se conduit plus comme une voiture de sport que comme une limousine : ses trains roulants sont affûtés, sa rigidité est étonnante et sa prise de roulis est maîtrisée. En clair, le comportement en virage est neutre, précis et efficace. Avec le V8 s/c, il s’agira de modérer son action sur la pédale de droite : le postérieur devient vif !

Confort

Plus destinée aux gentlemen qu’aux hooligans, les Jaguar se savourent par un toucher de route unique, soyeux, rappelant à leurs propriétaires qu’ils appartiennent à une autre caste. Ça, c’est la tradition. Du côté révolutionnaire, on retrouve des ingénieurs qui nous assènent qu’ils ont voulu rendre cette limousine particulièrement dynamique. En clair, ça secoue plus que d’habitude ! Surtout si vous optez pour des jantes démesurées ! Fichtre bleu !

Lorsqu’il a été question de concevoir l’habitacle, les ingénieurs ont également tiré un trait sur le passé. Nous sommes passé du cottage feutré, classique, avec feu ouvert et labrador à un lounge ultra moderne, sophistiqué et digne d’un vaisseau spatial. Outre la planche de bord profonde rappelant un… monospace, la XJ étonne par son électronique omniprésente : écran d’info-divertissement tactile et archi complet, instrumentation digitale,… Voilà une présentation qui risque de dérouter la clientèle habituelle ! Pourtant, le mot ergonomie semble avoir un équivalent en anglais et l’ensemble n’est pas trop compliqué pour y retrouver son chemin. Pour combien de temps ? On est en droit de se poser la question, histoire de savoir si toute cette électronique n’est pas sujette à d’éventuelles défaillances…

Mais le confort, c’est aussi le bien-être à bord. Et là, la XJ marque des points : outre son ambiance décoiffante, la Jaguar se savoure pour la qualité de sa climatisation et pour ses sièges superbes. L’habitabilité n’est pas exceptionnelle, mais devient bonne avec le châssis long, qui rajoute 12,5 cm. Pour le silence à bord, prière d’éviter les gros pneus ! Notre version diesel affichait quelques petits couinements de mobilier quand la V8 s/c se montrait parfaitement silencieuse… De ce point de vue : ouvrez le gosier des 8 cylindres et un chant guttural emplira vos oreilles… Et celles des badauds ! Quel récital !

Prix et équipement

Chapitre consommation… La diesel affiche une belle sobriété, preuve du bon rendement mécanique ainsi que des efforts de légèreté. Traduisez : 9 l/100 km. Vu la masse et les performances, c’est du beau boulot. Avec le V8 de 510 chevaux, ben… Comment dire ? On vise un tout autre budget : 15 l/100 km… Et restez léger sur la pédale de droite ou la sanction est immédiate : ça grimpe tout de suite de quelques unités !

Prix de base : 81.700 € pour la diesel Luxury. Mais à ce tarif, forcément, l’équipement est archi complet. Quant à la V8 S/C en châssis long : 147.900 €… Ahum, vos fins de mois sont laborieuses ?

Conclusion

Elles ne sont pas bien nombreuses à oser concurrencer le trio germanique Audi A8 / BMW 7 / Mercedes S. Dans le cas de Jaguar, c’est historique car la tradition XJ remonte à 1968 ! Mais ce nouveau modèle fait table rase du passé et mise principalement sur son dynamisme et son modernisme. Avec un certain succès il faut l’avouer. Non que la Jag’ soit parfaite, mais elle distille encore et toujours un charme qui lui est propre. A son volant, vous vous sentirez plus dandy que PDG. Son achat ne sera pas le résultat d’une froide réflexion incluant de nombreuses comparaisons, mais sera plutôt consécutif à un coup de foudre immédiat. Et en cela, on la remercie : l’Automobile suscite toujours les passions !