Mais si KTM veut élargir l'audience de sa Duke, le prix ne suffit pas! La Duke III se montrait, comme ses aînées, plutôt élitiste. La Duke 2012 s'assagit donc, et ça se remarque au premier coup d'œil. Exit donc les phares lenticulaires superposés qui marquaient le regard de la Duke. Adieu aussi, l'échappement sous le moteur, à la manière d'une RC8, remplacé par un classique pot monté latéralement, bien banal, tout comme la plaque phare et son optique trapézoïdale, bien dans l'air du temps chez de nombreux constructeurs. La poupe aussi s'épaissit et se complique, tandis que la selle se compose maintenant de deux éléments, plus bas, plus larges, et donc plus accueillants! KTM revendique d'ailleurs 90% de nouveaux composants. Si le look change, on retrouve malgré tout les fondamentaux, comme le cadre treillis, le bloc LC4 issu de la défunte 690R, le bras oscillant beau à tomber, les roues… L'esprit demeure!
Des économies inévitables
Pas de miracle, bien entendu: KTM ne peut offrir exactement la même chose pour un prix plus bas. Exit donc les maîtres-cylindres radiaux, exit les réglages dans tous les sens pour les suspensions WP, on se contentera de la précontrainte. Nous gagnons par contre l'ABS, toujours bienvenu, d'autant qu'il reste possible de le déconnecter au tableau de bord. Par sécurité, il se rebranche lorsque le contact est remis! Hormis l'ABS, la Duke 690 recèle pas mal de technologies "up to date": double allumage ride-by-wire, embrayage à glissement limité APTC (Adler Power Torque Clutch), étrier radial à quatre pistons, boucle arrière en alu…
Une ligne assagie
La ligne, assagie, décevra sans doutes les afficionados de la Duke III (dont nous sommes) mais apporte malgré tout pas mal de motifs de satisfaction. Le pot, plus classique, se réduit sous le moteur. Résultat, à garde au sol identique, la selle descend de 3cm, à 835mm. Elle abandonne aussi le profil radical qu'elle offrait au malheureux postérieur qu'elle accueillait pour une assise beaucoup plus large et accueillante. Le réservoir voit sa capacité légèrement augmenter, à 14 litres. Le bloc, basé sur le bloc de la défunte 690R, reprend ses côtes super carrées (102 x 84,5), mais hérite de deux bougies et annonce des chiffres de consommation en baisse de 10%. Et de fait, durant notre essai, la consommation n'a guère dépassé les 5L/100km, de quoi parcourir en théorie largement plus de 200km avant de voir s'allumer le témoin de réserve, vu que KTM n'a pas jugé utile de prévoir une jauge à essence. À ce propos, le compteur, minimaliste, comprend un compte-tours analogique, et un pavé numérique affichant la vitesse, l'heure, la température moteur (qui ressemble plutôt à une jauge à essence avec ses indications "Min" et "Max") et enfin un indicateur affichant successivement le trip total, deux trips partiels ou l'indication du rapport engagé.
Un mono reste un mono
Il faudra donc choisir entre le nombre de kilomètres parcourus depuis le dernier plein ou l'info plutôt utile du rapport dans lequel vous vous trouvez! En effet, un mono reste un mono, et ne brille guère par sa souplesse. Si, sur les premiers rapports le moteur accepte en ronchonnant de reprendre à partir de 2.000 – 2.500 tr/min, n'espérez rien sous 3.000 tr/min sur les intermédiaires, voire 3.500 tr/min sur les rapports supérieurs. Si la zone rouge commence à 8.000 tr/min, il ne semble guère utile de dépasser les 7.500 tr/min, soit une plage exploitable dans un bon 4.000 tr/min, plage dans laquelle le mono donne le meilleur de lui-même avec une force et une allonge considérables!
Rouler est jouer
Il faut savoir que ce bloc développe 70ch, avec un couple de 70 Nm à 5.500 tr/min, de quoi propulser la Duke à près de 200 km/h! Et c'est un régal d'user de ce tempérament pour bondir d'un virage à l'autre au guidon de la Duke. Elle donne dans cet exercice le meilleur d'elle-même. Avec un poids, dérisoire par les temps qui courent, de 160kg, c'est un jeu de la mener, d'autant que sa géométrie et son gabarit l'apparentent plus à une supermotard qu'à un roadster, donnant une position de conduite bien droite, buste près du guidon, avec très vite la tentation de sortir son pied dans le virage. L'apport d'un frein avant au tranchant radical, avec un excellent feeling (l'absence du maître-cylindre, radial ne semble guère l'handicaper), l'assurance de l'ABS, l'embrayage antidribble évitant d'intempestifs blocages, ou la réactivité du moteur lors des relances par la poignée "ride-by-wire", tout se conjugue pour donner la banane à son pilote.
Différente
A contrario, difficile de rouler sur un filet de gaz sans générer des à-coups désagréables. Dans les critiques encore, un ABS moins convaincant à la roue arrière, avec des remontées dans la pédale et une relative lenteur de réactivité. Peu de choses, en fait, et qui ne devraient pas refroidir l'enthousiasme de l'amateur de ce genre de machine. Les autres auront intérêt à d'abord l'essayer. Assagie, la Duke? À peine: une position de conduite un peu moins radicale, une hauteur de selle un peu plus accessible, un confort en progrès, certes. Mais une géométrie favorisant plus les pifs-pafs joueurs que les grands espaces, et un moteur particulièrement puissant et rempli, mais au mode d'emploi malgré tout contraignant et éloigné de l'onctuosité et de la facilité auxquels nous ont habitués les multicylindres. Une moto qui reste malgré tout exigeante, mais généreuse, très généreuse en sensations pour qui la choisira!