A croquer !
Avec ses dimensions compactes et son regard souriant, la 356 possède un charme indéniable. Ses nombreuses petites touches de chrome la situent bien dans son époque. De l’allure générale, on peut déjà retirer les traits de la future 911, qui les conservera jusqu’à aujourd’hui. Ce capot plongeant, ces ailes bien démarquées et cet arrière rebondi sont autant de traits caractérisant les Porsche actuelles. Moins racée et fine que la 911, la 356, de par ses courbes rebondies, charme immédiatement !
Position de conduite décalée.
Si l’accès à bord ne pose pas de problème particulier, la position de conduite est franchement déroutante ! La faute en incombe au pédalier (articulé au plancher, ce qui restera un trait caractéristique des 911 pendant de nombreuses années encore) qui est complètement décalé par rapport à l’axe du volant, l’accélérateur étant quasiment au milieu de l’habitacle ! C’est donc assis de biais que s’effectuera cette prise en main. Autre sujet d’étonnement : le volant ! Ciel, qu’il est grand ! Les autres commandes tombent parfaitement sous la main et la finition se révèle soignée. Nous sommes chez Porsche après tout ! Autres traits caractéristiques, encore d’actualité aujourd’hui : la clé de contact à gauche et l’instrumentation mettant le compte-tours bien en évidence au milieu.
Flapflapflap
Sur cette version SC, le 4 cylindres à plat développe 95 chevaux à 5.800 tr/min, ce qui est une belle performance pour un 1.6 l. Pour obtenir ce résultat, le moteur s’alimente via deux carburateurs, assez capricieux. Le démarrage à froid est plutôt laborieux et lorsque le moteur prend enfin vie, il le fait benoîtement, toussotant et éternuant généreusement. Après quelques minutes de chauffe, la sonorité devient déjà plus régulière et l’on reconnaît le traditionnel « flap-flap » de la Coccinelle. L’embrayage, très progressif, relâché et nous voilà en route ! Les carburateurs de notre exemplaire mériteraient une profonde révision, rendant la mécanique amorphe et bancale sous les 3.000 tr/min. C’est prévu ! Il faudra, en attendant, jouer du levier de vitesse, ce qui n’est pas du tout une sinécure : les rapports se verrouillent franchement, mais en douceur. Une fois ce régime atteint, le moteur se montre nettement plus vif et n’hésite pas à grimper dans les tours. Rigoureusement rien à voir avec le comportement amorphe d’un moteur de Cox’ ! Les 95 chevaux sont bien présents et propulsent sans peine la légère 356. Inutile d’en attendre des performances décoiffantes, mais le dynamisme est bien réel. Quant à la sonorité, elle est ici plus rageuse et sportive que sur la petite berline allemande.
Une réputation toute faite
A lire les essais de l’époque sur la 356, je ne partais pas très rassuré quant au comportement routier. Il était question d’un train arrière piégeur, ne demandant qu’à passer devant, et d’une tenue de cap très aléatoire, incitant à rouler en marche arrière pour obtenir une meilleure stabilité... Bref, tout cela n’était pas vraiment fait pour me rassurer, même si les dernières 356 (dont celle-ci fait partie) ont bénéficié d’un comportement plus sage et facile... Première impression : le volant est d’une douceur qui ferait pâlir d’envie ses concurrentes anglaises, au lourd moteur posé sur le train avant. La maniabilité est étonnante et en ville, la 356 se faufile sans peine au travers de la circulation. Un vélo ! Sur petites routes sinueuses, mieux vaut ne pas soulager l’accélérateur en virage, sous peine de sanction immédiate ! Mais les fins pneus de la Porsche se révèlent assez progressifs et la voiture communique sans filtre toutes ses réactions. Le conducteur se sent alors vraiment faire corps avec sa machine, ressentant les moindres trémolos de sa mécanique ainsi que toute tentative de dérobade de ses roues. En ligne droite, le mouvement pendulaire du volant n’incite pas à aller chercher les derniers km/h ! Surtout avec les sévères bourrasques de vent venant pimenter cet essai ! La petite Porsche n’est donc vraiment pas une monture d’autoroutes, d’autant que la boîte 4 tire assez court ! Au regard de l’époque, le freinage est excellent, déjà la signature Porsche, bien aidé il est vrai par les disques avant. Il ne faudra toutefois pas hésiter à appuyer sur la pédale pour obtenir un ralentissement efficace.
Bien amortie
Les quatre roues indépendantes de la 356 lui octroient, en plus d’une certaine efficacité sur la route, un confort remarquable, surtout si on la compare à la rusticité chronique des engins d’outre-Manche. La suspension préserve donc bien des cahots ! Seule la sonorité envahissante du « quatre à plat » peut fatiguer à longue ! Mais c’est là aussi le charme d’une ancienne... L’habitabilité est correcte à l’avant, logiquement intimiste. Quant aux embryons de place à l’arrière, ils viendront à point nommé comme espace de rangement supplémentaire.
Cote et entretien
Si à la lecture de ce qui précède, l’achat d’une 356 est devenu pour vous une évidence, sachez tout de même que la bête bénéficie d’une forte cote sur le marché des véhicules de collection. Les prix démarrent à 30.000 € pour une 356 B 60 chevaux en bon état. Sachez aussi que cette dernière présente des performances plutôt timides... Une version SC comme celle présentée ici peut prétendre à 40.000 € en état correct, voire 50-55.000 € si son état le justifie. En haut du panier, les Carrera, avec leur moteur ultra-sophistiqué, ne s’échangent pas à moins de 160.000 €. Quant au rare et recherché Speedster, sa cote dépasse allègrement les 120.000 € !
Heureusement, la bête se montre nettement moins capricieuse à l’usage que ses rivales italiennes ou anglaises. La fiabilité mécanique est réelle et le circuit électrique ne comporte pas d’aberrations. En revanche, une 356, ça rouille ! Il s’agira donc de bien vérifier avant achat, tous les points à risques, comme le bac à batterie à l’avant, les longerons latéraux, les passages de roues, les parois du coffre, ainsi que toute la partie située autour des barres de torsion arrière. Les pièces sont facilement disponibles, mais pas forcément bon marché ! Et inutile d’espérer s’en sortir avec des pièces de Coccinelle !
Conclusion
Alors ? Conquis ! La 356, du moins dans cette version, est une machine étonnement moderne ! La douceur de ses commandes et sa fiabilité proverbiale la rendent nettement plus facile au quotidien que la plupart de ses concurrentes. Certes, sa tenue de route demande une attention soutenue, ce qui pourra surprendre le conducteur habitué aux machines actuelles. Mais elle saura vous le rendre en retour, avec une efficacité réelle à la clé ! Que du bonheur ! Il ne me reste plus qu’à convaincre mon banquier...
Nos remerciements vont au Classic Club pour le prêt de cette très belle 356.