Franchement, mettre un moteur puissant en porte-à-faux arrière sur une propulsion, c’est faire tout le contraire de la logique. Mais que c’est sympa à conduire. Il est vrai que le train arrière a parfois envie de voir ce qui se passe devant. L’électronique se charge alors de limiter les envies rebelles de l’arrière. Au volant, on se délecte de ce caractère de cochon, à condition d’avoir un minimum de savoir-faire. Néanmoins, en conduite normale, la 911 se prête à tous les conducteurs suffisamment intelligents pour profiter avant tout du bruit et du privilège d’avoir un tel joujou entre leurs mains.
Non je n’ai pas changé
Les puristes sont ravis à l’idée de voir les yeux de la 911 retrouver leur rondeur d’antan et se séparer des clignotants. Il y a aussi cet arrière large. Certes, elle ressemble moins à un crapaud que certains modèles plus anciens. Sauf dans les rétroviseurs où l’arrière semble gigantesque. Mais ce n’est qu’une illusion d’optique. Quand on se laisse à admirer la ligne, la Porsche semble assise sur la route. Les ailes plus prononcées de ce modèle et les nouveaux rétroviseurs à embase double branche affirment le caractère sportif de la bête. La taille affermie, les optiques sympathiques et le tracé des joints de carrosserie dévoilent les charmes de la belle. Cette ligne nouvelle a aussi un avantage aérodynamique : le coefficient Cx de pénétration dans l’air est passé de 0,30 à 0,28.
Bruit magique
Fidèle au flat 6, le constructeur a gardé, grosso modo, le moteur de 3,6 litres de la 996. Il faut dire que c’était là une demande de la clientèle plutôt satisfaite de cette mécanique. Les ingénieurs de Stuttgart ont quand même optimisé le cycle de charge pour gagner 4 Kw (5 ch). Nous avons donc 239 kW (325 ch) derrière la banquette arrière. Ce surcroît de puissance donne des performances délicieuses : tempo 100 en 5 secondes et passage de 0 à 200 km/h en 12,5 secondes ! Il faut bien sûr faire monter l’aiguille du compte-tour et ne pas avoir peur de se lancer dans pareille aventure. La puissance maximale est atteinte à 6800 tours minute. Le couple de 370 Nm est disponible à 4250 tr/min. Pour la vitesse de pointe, elle va affoler les appareils photo le long des routes : 285 km/h ! Autant le faire sur circuit. À l’usage, une voiture avec une telle puissance autorise une certaine souplesse dans l’utilisation des rapports. Mais si on veut profiter de la sonorité magique du 6 cylindres à plat, il faut bien sûr manier le levier de vitesse avec dextérité et anticipation.
Nouvelle boîte
L’ancienne boîte arrivait à ses limites, surtout avec la Carrera S. Porsche a donc planché sur le sujet. Exit le laiton. La nouvelle fait désormais appel pour tous les rapports à des anneaux de synchro en acier plus résistants. Et première chez Porsche, le premier, le deuxième et le troisième rapports portent également un revêtement en carbone résistant à l’usure. Malgré l’augmentation du diamètre des arbres et de la largeur des pignons, le poids n’a pratiquement pas évolué. La synchronisation a aussi été revue dès lors on ne doit pas déployer énormément d’efforts sur le levier de vitesse. Les passages de rapports sont courts, rapides et précis. Pour une voiture à vocation sportive, cette boîte est même franchement docile.
Un bouton magique
Notre véhicule d’essai a reçu le pack Sport Chrono Plus. Il suffit d’appuyer sur le bouton sport et on entre dans une autre dimension. Avec la prudence qui s’impose, la 911 dévoile sa vraie carrure d’athlète. La gestion Motronic débride la Porsche tout d’abord par le biais de l’accélérateur électronique qui passe à une loi de pente plus forte. Changent également le comportement du moteur au régime limite, le cycle de charge et les seuils d’intervention du régulateur de stabilité PSM et les cartographiques du système PASM. Non seulement on le sent au volant (oufti gamin !) mais on l’entend aussi. L’acoustique dans l’habitacle se fait nettement plus joviale. Autre petit plus, avec ce pack, on a droit au chronomètre sur le tableau de bord. Histoire de voir si on peut arriver à reproduire les performances de la fiche technique sur circuit.
Accrochée au bitume
Ce qui est rassurant aussi avec une Porsche, c’est sa capacité de freinage. Les quatre roues de la Carrera 911 ont droit à un frein à étrier fixe monobloc à quatre pistons anodisé noir pinçant un disque ventilé et ajouré. Le diamètre des disques est de 318 mm à l’avant et 299 mm à l’arrière. Petit changement quand même par rapport à la 996 : le facteur d’amplification du servo a été augmenté de 17 % pour s’établir à 4,5/1. Et ceux qui comptent l’utiliser souvent sur circuit ont tout intérêt à la doter du PCCB – le Porsche Ceramic Composite Brake. La tenue de route est celle d’une propulsion à moteur arrière. Et quand la route est humide et les pneus un peu usés, il vaut mieux rester vigilant. D’autant que durant notre essai nous avons eu droit à de véritables trombes d’eau au point de se retrouver, sur la route pourtant, au milieu des canards. Le train roulant de base de la nouvelle 911 Carrera s’est élargi de 21 mm au nivea�u de l’essieu avant et de 34 mm à l’essieu arrière. De plus, il a fait l’objet d’un nouveau réglage. Pour sa part, la monte pneumatique peut transmettre des forces longitudinales et transversales plus importantes. Devant elle chausse du 235/40 ZR 18 et d’un impressionnant 265/40 ZR 18 à l’arrière. Et pour garder le cap, le conducteur peut compter, pour la première fois, sur une direction à crémaillère à démultiplication variable. Mais aussi sur le PSM. Le Porsche Stability Management a également évolué. Son intervention a été repoussée à 70 km/h aux vitesses inférieures. De quoi permettre une belle agilité en virage. Une fois débranché manuellement, le PSM veillera toujours pour se remettre en fonction au moindre freinage nécessitant l’ABS.
Finition haut de gamme
De nos jours, Porsche ne se moque pas de sa clientèle. Très à l’écoute, la marque entend aussi offrir un produit sans reproche. La qualité de finition est parfaite, les sièges autorisent tous les réglages et même le coffre à l’avant a été approfondi pour offrir un peu plus de volume. Certes, à l’arrière c’est toujours aussi rikiki. Cela convient à des enfants, moins à des adultes. Pas question donc d’emmener 3 auto-stoppeuses jusqu’à Saint-Tropez. Il faudra se contenter d’une seule ;-) Ce qui est rassurant tout de même c’est de voir le niveau de sécurités active et passive à bord. Des renforts soigneusement étudiés sur la structure de carrosserie augmentent encore la sécurité anticollision. Sans parler des airbags, dont un thoracique intégré au flanc extérieur du dossier de siège avant et un airbag de tête logé dans la portière. Pour améliorer la lisibilité du tableau de bord, les cinq instruments sont moins imbriqués les uns dans les autres. Et la vitesse est rappelée de manière numérique pour pouvoir mieux la surveiller. La seule véritable amélioration à apporter c’est la télécommande de la clé. L’ouverture et la fermeture de la 911 se commandent avec le même bouton. C’est pas pratique, surtout pour une voiture à ce prix qu’on préfère ne pas laisser ouverte sur la voie publique. Paradoxalement, Porsche a aussi pensé à diminuer les coûts d’utilisation. La consommation, déjà, en conduite non sportive, peut se tenir à 11 litres en moyenne… de superplus 98 octane. Plus intéressant, par contre, ce sont les intervalles de révision portés à 30.000 km. De plus, le pare-chocs avant déformable protège davantage la caisse et plusieurs composants de la carrosserie sont prévus pour limiter les frais en cas de réparation. Nous, toutefois, on préfère garder « notre » Porsche 911 sur la route. Question de dosage du pied droit.
© Lionel Hermans