Hiérarchie établie…
Chez Land Rover, on connaît bien sûr l’indécrottable baroudeur Defender, spartiate, mais charismatique. Puis, désireux de plaire aux Lords chasseurs, la firme a engendré le Range, le tout terrain de luxe par excellence, élégant sujet de Sa Majesté. Les années qui suivirent ont connu quelques timides extensions de gamme, à l’instar du Range Sport (un Range bodybuildé pour les esprits plus « funky »), du Discovery et du Freelander, qui incarne la démocratisation de la marque et la riposte au segment alors grandissant des mini SUV !
Bousculer les règles…
L’Evoque, lui, chamboule tout. Un peu comme si Sa Majesté découvrait tout à coup le monde dans lequel elle vivait, et se décidait d’entamer ses journées avec un jogging, iPod aux oreilles et de les finir dans les bars « tendance » de la capitale, en short moulant et top à paillettes ! Insolite, mais intriguant… Pourtant, on ne peut nier un air de famille avec le restant de la gamme. Non, décidément, l’Evoque est à Land Rover ce que les Beatles furent au conservatisme musical britannique. Ça bouscule les règles, mais ça se trimballe toujours en complet veston !
Un aventurier ?
Chez Land Rover, un SUV, ce n’est pas juste taillé pour escalader un trottoir. Ça se doit de franchir les obstacles les plus improbables avec une désarmante efficacité ! Question de tradition… Et question de panache, car même si la clientèle n’ira probablement jamais saloper la belle auto dans la boue, elle pourra toiser le voisinage dont les SUV teutons ou coréens frissonnent devant le premier caillou venu.
Alors l’Evoque, tout « Urban-Fashion » qui l’est, embarque toute la technologie nécessaire pour se dépêtrer comme un grand. A savoir, avec le Terrain Response, qui permet d’adapter l’engin en fonction du type de terrain (Normal-herbe/gravier/neige-boue/ornières-sable). Certes, il ne possède pas les quatre motrices permanentes : le système Haldex s’occupe d’entraîner le train arrière quand la situation le requiert. Pire : il est disponible avec deux roues motrices seulement… Mais soyez rassurés : ses compétences en tout terrain restent au plus haut niveau !
Dans le détail…
En dépit d’un look aussi polarisant, Range Rover veut être sûr d’élargir sa clientèle au maximum. Dès lors, les variantes ne manquent pas : coupé trois portes (très réussi), berline 5 portes, trois niveaux de finition, 2.2 l diesel de 150 ou 190 chevaux, 2.0 l essence de 240 chevaux, boîtes manuelle et automatique, traction avant (uniquement en 150 ch et boîte manuelle) ou transmission intégrale…
Vous grimperez bien à bord ?
Cocons douillets et chaleureux, les Range se sont souvent assimilés à de confortables cottages, capables de patauger dans la boue avec beaucoup de chic. Cuir et bois à profusion dans l’habitacle donnaient cette unique ambiance traditionnelle, taillée pour ne pas perturber les bonnes vieilles habitudes d’une aristocratie en Tweed…
L’Evoque, lui, continue sur sa lancée d’anarchiste, en oubliant le traditionnel bois de ses grands frères et en adoptant une présentation plus orientée « Austin Powers » que « James Bond » ! Bref, le côté « labrador au coin du feu » est échangé pour une ambiance nettement plus disco et high-tech ! Le cuir s’invite à profusion dans l’habitacle, tandis que le pavillon tendu de noir (selon finition) confère une ambiance intimiste à l’ensemble. Une voiture de sport ? On pourrait le croire, avec cette instrumentation explicitement orientée vers le conducteur et le petit volant tenant bien en main… Mais non, les jambes qui pendouillent rappellent que l’on est plus assis que couché au volant, signe que Land Rover n’a pas balayé toutes ses habitudes… Quant au système d’info-divertissement, il est l’un des plus intuitifs et des plus complets du segment.
Dimensions inédites…
Si l’on jette un œil du côté des dimensions, on se rend vite compte que l’Evoque a bel et bien abandonné le format « armoire normande » des autres modèles : 4,37 mètres de long seulement, mais 1,97 m de large et 1,64 m de haut ! Pourtant, en dépit de cette longueur limitée, la chose est vaste à l’intérieur ! Une impression confirmée par les passagers arrière, qui ont uniquement pesté contre l’assise mal dessinée et, pour les plus grands, la garde au toit limitée. Parce qu’il est toujours sympathique d’embarquer de menues affaires avec soi, l’Evoque affiche un coffre aux dimensions fort généreuses : de 575 à 1.445 litres !
Sur la route ?
iPod connecté, navigation programmée, sièges réglés, ceinture bouclée, on est paré pour faire un tour ! Notre monture bénéficiait du plus costaud des diesels (190 ch), associé à la boîte automatique à 6 rapports. Une brillante association, où le seul élément perturbateur est la boîte, ayant tendance à piquer le moteur au vif en le titillant dans les tours, parfois plus que de raison… Un mince reproche, mais c’est tout ce que j’ai à formuler ! Pour le reste, c’est un tableau quasi parfait : souplesse, puissance, une certaine sobriété et douceur des passages de vitesse… Ah oui, j’oubliais, le grondement sourd du moteur à hauts régimes aurait pu être atténué davantage. Sinon, en usage courant, c’est motus et bouche cousue…
Brillant !
Mais le plus phénoménal reste encore à venir : la tenue de route ! On l’a dit, les Range sont historiquement associés à une image tenace d’aristocratie partant pour la chasse à courre… Pas de quoi attaquer les virages en travers, donc. Mais ici encore, revirement de situation ! Traction équilibrée ou 4x4 inébranlable, l’Evoque est scotché au sol, et, mode sport sélectionné, vire sans prendre de roulis ! Mieux, il est même possible de faire enrouler le train arrière ! Des trains roulants affûtés de la sorte, on aimerait en retrouver sur certaines berlines « sportives »… Que lui reprocher ? Une piètre visibilité périphérique… Un gros point noir en ville.
Mais là où l’Evoque se révèle réellement estomaquant, c’est dans sa capacité à avaler les obstacles les plus indigestes sans broncher. Confortable, sans avoir le moelleux d’un divan avachi, il est également capable de surmonter l’insurmontable, en conduite tout terrain. Pas de doute, c’est un vrai Range. Remarquablement insonorisé, qui plus est… Quant aux sièges semi-baquet de notre version Dynamic, ce n’est que du bonheur ! Maintien et confort, on voit mal ce qu’on pourrait leur demander de plus !
Le sujet qui fait mal
Disponible à partir de 33.800 € en 5 portes et 34.500 € en trois portes, l’Evoque n’est pas à proprement parler « abordable »… D’autant que les – tentantes – possibilités de personnalisation sont innombrables. Notre version Dynamic, équipée de la boîte automatique et du moteur 190 chevaux est affichée à… 48.800 € hors options… Car même à ce tarif-là, il reste quelques babioles fort tentantes, comme la caméra de recul, les capteurs de parking avant, le rétroviseur jour/nuit automatique, les sièges chauffants, la suspension adaptative, le toit panoramique… Bref, grimper au-dessus des 50.000 € est un jeu d’enfant. Voilà qui devient fort cher pour 4,37 mètres de voiture…
Heureusement, on se rattrape (légèrement) à la pompe. Car si l’Evoque mérite son patronyme, il affiche une consommation inhabituelle pour la marque : descendre sous les 8 l/100 km est tout à fait dans ses cordes ! Cela vous semble beaucoup ? N’oubliez pas : l’engin est haut, possède 4 roues motrices, une boîte automatique et quelque 190 chevaux ! En conduite éco, il est même possible de chuter allégrement sous les 7 l/100 km !
Conclusion
On l’adore cet Evoque… Si en apparence, il semble transgresser toutes les habitudes de la marque, il est en réalité, l’un de ses plus dignes représentants. A l’aise dans toutes les situations, il se révèle aussi gratifiant à conduire qu’il est intriguant à contempler. Voilà une éclatante réussite, l’une des pièces maîtresses de l’année 2011. Quel dommage qu’il soit si cher…