Le dernier des Mohicans
Le marché des SUV de luxe est curieusement peuplé : on y trouve des produits taillés pour impressionner les âmes sensibles dans les centres urbains, d’autres mastodontes qui tentent de nous faire oublier leur masse en avançant des valeurs de consommation étonnantes, voire, enfin, d’improbables engins, se donnant des allures d’aventurier accompli mais tout justes capables d’escalader un trottoir…
Rien de tout cela avec le Range… D’ailleurs, lui, il n’est pas le fruit de cerveaux fumants voulant occuper un marché bien encombré, car ce marché des SUV luxueux, justement, c’est lui qui l’a créé !
A vous l’Ecosse !
Indémodable, le Range l’est tout autant que la relève de la garde. Vous viendrait-il à l’esprit de signaler à Sa Très Gracieuse Majesté que son chapeau est passablement démodé ? Pareil pour le Range. Traversant les années au prix de menues retouches, il reste toujours aussi imposant. Ses dimensions impressionnent, sa stature également, mais on y trouve un parfum d’une rare élégance. Curieux ressenti, faut-il l’avouer, car sous cette stature rectangulaire, le béotien imagine mal un soupçon de poésie…
Et pourtant, sous ces angles nets, se cache une histoire, un pedigree indiscutable qui ne donne qu’une envie : celle d’en prendre le volant et de traverser les brumeuses landes écossaises. Avec un concerto pour cornemuse à la radio et un Lord en tweed de la tête aux pieds, à ses côtés !
La dure réalité…
Même les légendes subissent les lois du marché. Ainsi, il ne suffit pas de s’imposer comme référence, encore faut-il le confirmer année après année ! Et les défis de chaque décennie se suivent sans se ressembler : après la quête du dynamisme, de la sécurité, voici la chasse au CO2.
Le Range y répond de la plus somptueuse manière qui soit : avec un moteur revu, corrigé et une nouvelle boîte de vitesses. Cette fois, les performances progressent d’un sérieux bond alors que la consommation profite de cette nouvelle transmission à huit rapports.
V8, encore et toujours…
Que ce soit en essence ou en diesel, le Range ne s’anime que via des V8. En diesel, le cas qui nous occupe, le résultat ne souffre en rien du manque de noblesse du carburant : puissance, souplesse, onctuosité et même, sonorité dans les tours, ce V8 offre la totale ! Il faut bien avouer que les caractéristiques jouent en sa faveur : avec 4,4 litres de cylindrée, il a des poumons en acier pour extraire 313 chevaux et un couple gargantuesque de 700 Nm à 2.000 tr/min !
Les résultats face au chrono sont édifiants pour un tel monument : près de 210 km/h en pointe et moins de 8 secondes pour atteindre les 100 km/h ! A la pompe, les progrès sont réels : la consommation tombe de 18,5 %, soit une consommation moyenne de 9,4 l/100 km. Les émissions chutent également, à 253 g/km.
Dans le détail
Le Range en profite pour revoir une série de détails, comme le Terrain Response (et notamment, la fonction d’aide au démarrage en côte), le niveau d’équipement arrière, avec des sièges arrière inclinables ainsi que quelques petites touches de design extérieur. Traditionnellement symphonique, la stéréo Harman Kardon affiche 1200 Watts et pas moins de 19 haut-parleurs !
On vous emmène ?
Difficile de résister à pareille invitation ! A l’épreuve de la route, ce nouveau V8 est édifiant : en dépit d’une masse frisant l’indécence (2,8 tonnes !), il catapulte ce dolmen sur roues avec une vigueur stupéfiante ! Certes, la masse se ressent et calme les ardeurs, mais les accélérations linéaires et franches vous propulsent rapidement à des vitesses inavouables ! Et le tout, dans un feulement précipité de V8, principalement perceptible au-delà des 3.000 tr/min. Quant à la boîte, elle est la parfaite complice, enchaînant les rapports avec douceur, en faisant preuve d’intelligence, voire d’anticipation. Une merveille de mariage moteur/boîte !
Ne jouez pas trop de même sur routes sinueuses : l’inertie est tout de même conséquente et la physique, elle aussi, a ses limites !
Un salon !
Le plus impressionnant avec le Range, c’est encore sa facilité déconcertante à effacer les obstacles, quels qu’ils soient, sans le faire ressentir à bord ! En clair, escalader l’Himalaya en savourant Beethoven dans un confort princier, il peut le faire ! Question confort, donc, le Range assure. A un niveau rarement atteint ! Dommage qu’il ne comporte que 5 places assises…
Question fonctionnalité, difficile de lui reprocher quoique ce soit, tout étant démesuré dans cet engin ! A un point qu’il en devient particulièrement ardu d’aller rechercher vos petites affaires au fond du coffre : la ridelle pivotante du coffre (qui s’ouvre en deux parties) constitue un sacré obstacle qu’il convient de surmonter en se contraignant à une posture peu en accord avec le statut de l’engin !
Alors ?
Naturellement, le Range Rover TDV8 est l’un des plus nobles représentants de son espèce. Avec lui, la noblesse vous est quasiment acquise. Somptueux sur la route, redoutable en dehors, il reste au sommet tout en ayant l’élégance de ne jamais briser son image de Dandy conservateur. Son nouveau moteur lui donne un souffle époustouflant, sans vous ruiner à la pompe : 12,9 l/100 km de moyenne !
Des défauts, il en a : son gabarit devient vite franchement handicapant, pour ne pas dire préoccupant en milieu urbain, son tarif est démentiel (près de 90.000 € minimum !) et il convient de garder constamment à l’esprit que l’engin accuse une certaine masse sur la balance ! Mais ne devrait-on pas plutôt parler de traits de caractère ?