La DL 650 n’est pas de celles-là. Elle fait partie de ces motos qui n’accrochent pas le regard, qui ne suscitent pas cette furieuse envie de la posséder. On la prend à l’essai, presque comme une obligation. Elle en impose pourtant, pour une 650. Pas étonnant, ses côtes sont pratiquement identiques à la 1000! Imposante certes, mais guère sexy… Pourtant, une fois enfourchée, la position de conduite s’impose, évidente, à mi-chemin entre le trail et le roadster, proche d’une GT, avec l’efficace protection de la bulle qui génère toutefois beaucoup de bruit au niveau du casque.
Pourtant…
On tombe progressivement sous le charme, au fil des kilomètres, sans vraiment s’en rendre compte, sans forcer, sans coup de cœur, mais avec conviction. Les trails connurent leur heure de gloire dans les années 80-90. D’abord modestement, avec l’apparition du XT 500. Avec l’attrait du Dakar vint l’ère de la démesure: des bêtes d’une hauteur effroyable, avec des débattements qui n'en finissent pas, et des réservoirs gonflés à traverser le désert sans refaire le plein! Puis un timide retour à une approche plus calme, plus subtile, le trail tendance GT. Ces motos partagent toutes, avec plus ou moins de bonheur, l’art du compromis. La plus belle réussite dans ce domaine appartient sans doute à BMW avec la 1200GS, mais à quel prix… Les ténors de la catégorie affichent des cylindrées de 1000cc et plus, laissant en dessous d’elles la place à des motos plus sages, plus raisonnables. Dans ces moyennes cylindrées qui oscillent entre 600 et 750cc se bousculent nombre de roadsters ou de supersports, mais bizarrement peu de trails.
L'attrait du twin
Certes nous retrouvons plusieurs monocylindres, mais qui ne peuvent en aucun cas se revendiquer des trails tendance GT. En cherchant bien, on y trouve la Transalp, une pionnière, la V-Strom et la petite dernière de Kawasaki, la Versys. Et pourtant, ce créneau peu développé, peu exploité, apporte des perspectives encourageantes, à défaut de déchaîner les passions. Ces moyennes cylindrées possèdent des moteurs souvent non dénués de caractère grâce à des mécaniques bicylindres préservant la polyvalence héritée de leurs grandes sœurs, mais se montrent plus sages, plus réalistes en termes de prix ou de performance. La V-Strom 650 ne fait pas exception à la règle. Certes, elle en impose pas mal pour une 650, mais rien de trop rédhibitoire, à moins d’être vraiment court sur pattes. La position de conduite, tellement intuitive, tellement rassurante des trails rend le pilote immédiatement serein. Le 650 issu de la 650 SV offre un tempérament bien affirmé, reprenant dès 1500 à 2000 tr/min avec bonne volonté pour s’exprimer jusqu’à plus de 10.000 tr/min, sans débordement de violence parfois difficilement contrôlable.
Que de qualités!
Le moteur, vif, rempli, maîtrisable, trouve place dans une partie cycle surdimensionnée et d’une remarquable polyvalence. Aussi vif en ville qu’amusant sur route ou rassurant sur autoroute, ce châssis s’acquitte à merveille de toutes les situations, distillant un réel plaisir de conduite à tous les instants.
Non contente d’apporter ce vrai plaisir de conduite, la DL 650 brille aussi par un confort qui permet au pilote d’envisager le voyage, seul ou accompagné. Le haut niveau de protection généré par la carrosserie l’y incite, et l’excellence de l’ensemble se confirmera au fil des kilomètres. Alors, que rêver de plus? Pas grand-chose en effet. Peut-être des freins un peu plus mordants, encore qu'ils s'acquittent parfaitement de leur tâche, bien secondés par un ABS dont il serait sot de se priver (500€), ou une finition moins pauvrette: cette finition sans attrait participe au manque de sex appeal général de cette moto qui ne suscite guère les passions par son look. Les plastiques sans grâce s’assemblent sans la moindre finesse. Il doit pourtant être possible de dessiner joliment une moto par ailleurs pétrie de qualités ! Tellement pétrie de qualités que pour quelqu’un qui cherche autre chose qu’un jouet sans pour autant se ruiner, il sera difficile de faire l’impasse sur la DL 650 V-Strom, qui s'affiche à 7830€ (8330€ avec ABS)!
© Bruno Wouters