Pas de surprise, la Super Ténéré s’identifie immédiatement comme l’héritière d’une lignée qui s’est forgé sa légitimité sur les pistes africaines du Dakar. La silhouette de la (grande!) petite dernière, fine, haute et étroite, reprend les canons du style en vigueur dans la marque. La Super Ténéré se veut pourtant entièrement nouvelle. Elle reprend une motorisation bicylindre face à la route à doubles arbres à cames en tête et quatre soupapes par cylindre, un bloc refroidi par eau qui ne doit paraît-il rien à la défunte et atypique TDM 900. Le cadre en acier à haute flexibilité a été préféré à l’alu pour mieux résister aux contraintes du hors-piste.tandis que les suspensions restent classiques, avec une fourche inversée de 43mm de diamètre et un mono-amortisseur relié à un bras oscillant en alu. La bonne surprise vient de la transmission par arbre, un élément incontournable pour une machine qui a l’ambition de chasser sur les terres de l’allemande.

Equipement complet et soigné

Les roues, respectivement de 19 et 17’’, sont rayonnées et adoptent chacune un profil particulier permettant le montage de pneus sans chambre. La jante avant présente du coup une double nervure dont on sent déjà qu’elle ne sera guère amusante à nettoyer. Le freinage, qui fait appel à trois disques, est combiné avant-arrière au moyen du levier de frein avant, avec la technologie ABS de série. Parmi les équipements, citons encore l’anti-patinage réglable en deux positions en plus du mode "off", la cartographie d’injection qui permet au pilote de choisir entre un mode "T" pour Touring et "S" pour Sport. Le réservoir en acier contient 23 litres, la boucle arrière est prévue pour accueillir la charge de deux valises en alu. L’équipement d’origine inclut deux optiques, des coquilles de protection pour les mains, une bulle et une selle réglables, un sabot moteur, ainsi qu'une prise 12V auxiliaire dans l’avant du carénage. Pour son lancement en Europe, la Super Ténéré apparaît sous la forme d’une série spéciale "Aventure Edition" qui reçoit deux valises en alu, une protection de phare, un sabot moteur en alu et deux stickers "First Edition", tous éléments qui seront en option dès 2011.

Solutions classiques

Parmi les autres options nous retrouvons les poignées chauffantes, indispensables aux grands rouleurs, une selle plus basse de 35mm, un sac de réservoir, un topcase en alu, pour ne citer que les plus pertinentes. Il paraît en définitive assez surprenant de la part de Yamaha d’user de recettes aussi convenues pour contrer l’originale BMW R1200GS sur son terrain, mais peut-être est-ce le bon calcul pour récupérer une frange de la clientèle insensible aux spécificités de l’allemande. Les premiers tours de roues, et c’est une généralité pour toutes les japonaises, se veulent faciles et intuitifs. La position de conduite, le buste bien droit et les jambes idéalement repliées avec la selle en position haute, montre ici la justesse du concept des maxitrails. On domine la route, le grand guidon rassure et permet une conduite précise en toutes circonstances. La bulle, réglable au moyen de vis, soulage parfaitement de la pression du vent, sans pour autant créer de remous désagréables au niveau du casque.

Vie à bord

Un bonheur ne vient jamais seul, et le tableau de bord parfaitement lisible confirme avantageusement cette première bonne impression. Petit bémol toutefois pour l’absence dans l'affichage du rapport engagé, les commandes au moyen de boutons peu accessibles sur le tableau, ainsi que le bizarre passage des câbles de gaz. On a vu mieux! Nos premiers tours de roues s’effectuent en mode Touring, un mode que nous abandonnerons immédiatement une fois sortis de la ville, tant la moto semble castrée. Situation non sans un certain intérêt toutefois, puisque le rythme de conduite se veut de facto plus posé et donc moins sensible aux nombreux radars ornant le bord des voiries! Mais la Super Ténéré ne reflète sa vraie personnalité en mode Sport, un mode que nous pourrons utiliser sans arrière-pensée puisque la XTZ bénéficie d’un anti-patinage muselant tout débordement du moteur en situation délicate. Le hors piste n’est pas oublié puisqu’en position "2" un léger patinage est autorisé. Le twin reprend avec bonne volonté dès 2.000 trs/min et montre un sursaut d’énergie à partir de 5.000 tours jusqu’à la zone rouge. Le bicylindre tracte avec entrain et réactivité la Yamaha, montrant qu’il n’est nul besoin de déployer plus de puissance pour répondre à tous les usages attendus d’une moto. On regrettera toutefois une bande "son" peu motivante.

Enfin une alternative crédible

Le châssis satisfait pleinement aux besoins avec un comportement rigoureux et un bon confort. Pas de quoi renverser la BMW, mais bien assez pour ne pas démériter. On lui reprochera malgré tout un poids trop élevé et haut perché, mais rien de rédhibitoire une fois la moto en mouvement. La qualité de finition de la Super Ténéré semble soignée mais nous émettons de sérieux doutes sur la résistance au temps des serrures des valises latérales, valises assez peu probantes au demeurant: haut perchées, elles n’acceptent pas de casque (et nous n’avons pas trouvé de crochets pour accrocher ceux-ci sous la selle). La Yamaha Super Ténéré tire admirablement bien son épingle du jeu, sans toutefois arriver à déboulonner celle qui semble décidément… indéboulonnable. Seul le prix (ou une allergie à la BMW) pourra objectivement faire pencher la balance en faveur de la Yamaha. A prix quasi égal, soit 14.990 € pour la Yam, celle-ci offre en prime l’anti-patinage, l’ordinateur de bord, les valises latérales, les protège-mains et les jantes à rayons, toutes options à rajouter au prix de la BMW. Il n’empêche, voici enfin une alternative crédible à la teutonne, il n'était que de voir l'intérêt qu'elle a suscité parmi les spectateurs des toujours aussi passionnants Bikers' Classics!