A l’exception d’une violente averse survenue samedi soir, la 61ème édition des Total 24 Hours of Spa s’est principalement déroulée sur piste sèche. Et elle a donné lieu à une somptueuse bataille entre Maserati et Corvette, un thriller haletant qui n’a connu son dénouement qu’à quelques encablures de l’arrivée.

Le triplé Maserati réalisé au terme d’essais qualificatifs perturbés par la pluie n’était pas révélateur de l’équilibre des forces en présence. Et dès les premiers tours de course, les Corvette pointaient le bout du nez pour prendre rapidement la direction des opérations. Pendant deux heures, la bataille faisait rage entre les Z06 emmenées par le Britannique Oliver Gavin et les MC 12 Vitaphone avant que survienne le premier coup de théâtre de l’épreuve. A 18.15 h, la Corvette Sangari Team Brazil dont Roberto Streit venait de prendre le volant sortait violemment de la route au sommet du Raidillon. La machine aux couleurs brésiliennes était totalement détruite dans l’aventure mais le pilote sortait indemne de cet accident.

Devant, la Corvette du Selleslagh Racing Team semblait creuser l’écart sur le reste du peloton lorsqu’un violent orage éclatait sur le coup de 19 heures. Plusieurs pilotes, piégés en pneus slicks sous le déluge, partaient à la faute. Jacques Villeneuve, l’ancien champion du monde de Formule 1, était malheureusement du nombre et tapait le mur à la sortie du virage de Blanchimont. Cet incident provoquait l’abandon de la Mosler MT 900 que le Canadien partageait avec le Chinois Tung et nos compatriotes Radermecker et de Sordi. 

Après une neutralisation de la course pour évacuer les débris, la ronde infernale reprenait son cours et la soirée était marquée par une lutte somptueuse entre les Maserati 1, 2 et 33 et les Corvette 3 et 4 qui ne se lâchaient pas d’un pouce. Et c’est peu après minuit que survenait le deuxième événement majeur du double tour d’horloge. Andrea Bertolini perdait le contrôle de la Maserati de pointe à la sortie du double gauche et percutait le rail. L’Italien parvenait à ramener la machine blessée au stand, mais la grosse partie de mécanique qui suivait faisait plonger la n° 1 dans les profondeurs du classement. Et à peine ce coup du sort digéré, le clan Vitaphone encaissait un nouveau coup dur lorsque la MC 12 n° 33 de Pier Guidi rejoignait son box avec l’avant endommagé par une touchette. Si la réparation ne prenait guère de temps, un événement tragi-comique allait semer le trouble dans la belle organisation germanique. Lors du changement de pneumatiques, une roue avait roulé sous la voiture, sans que personne dans le team ne s’en aperçoive. Et lorsque les vérins pneumatiques s’abaissaient, la GT transalpine atterrissait en équilibre instable sur le pneu, occasionnant des dégâts au fond plat et à un radiateur. Le temps de procéder au changement des pièces abîmées et la voiture de Pier Guidi-Lémeret-Vosse-Rosenblad chutait elle aussi dans la hiérarchie.

Cette cascade d’incidents laissait aux prises deux Corvette face à la seule Maserati qui n’avait pas connu de souci majeur. Et ces trois bolides allaient animer toute la nuit, échangeant leurs positions au gré des ravitaillements. Un coup à toi, un coup à moi, la bataille faisait rage dans l’obscurité, les trois premiers franchissant le cap de la mi-course seulement séparés par moins de sept secondes !  La lutte se poursuivait durant la matinée et Oliver Gavin établissait le meilleur tour en course en 2’15"423 peu après 7 heures. Mais alors que la Maserati n° 2 s’était ménagée un petit avantage vers 10 heures du matin, un nouveau coup de tonnerre résonnait dans la cuvette de l’Eau Rouge. Une roue arrière de la MC 12 venait de se détacher et provoquait un tête-à-queue de la voiture. Un événement qui était synonyme d’abandon pour la belle italienne et de fin brutale des espoirs d’Eric van de Poele de conquérir un sixième succès dans l’épreuve ardennaise. 

La tension ne baissait pas pour autant car la lutte de prestige entre les Corvette SRT et Pekaracing n’autorisait pas le moindre relâchement. Les pilotes de la 3 et de la 4 s’entredéchiraient jusque midi lorsque survenait le dernier coup de théâtre de la course. La Z06 alignée par le Selleslagh Racing Team connaissait des problèmes de fuite d’huile. Après examen, il apparaissait qu’une durit avait lâché. Le temps de remplacer l’organe défaillant, la Corvette reprenait la piste mais rentrait rapidement au stand. Le moteur, privé d’huile suite au bris de la durit, avait souffert dans l’aventure et c’était la fin de la belle aventure pour Maxime Soulet, Bert Longin, Oliver Gavin et James Ruffier…

Une voie royale s’ouvrait dès lors pour la dernière Corvette valide, engagée par le Pekaracing pour nos compatriotes Anthony Kumpen et Kurt Mollekens (déjà vainqueur en 2000 sur une Peugeot 306 qu’il partageait avec Bouvy et Defourny), associés aux Hollandais Mike Hezemans (lui aussi victorieux sur une Corvette Phoenix en 2007 avec Deletraz, Gollin et Fässler) et Jos Menten. Le premier et le troisième nommés, associés en championnat FIA-GT, prenaient du même coup le commandement de la compétition.

Derrière la Corvette victorieuse, c’est la Maserati de Vosse-Lémeret-Pier Guidi-Rosenblad qui récoltait le premier accessit au terme d’une remontée méthodique. Et la dernière marche du podium était décrochée par l’Audi R8 LMS Phoenix Racing de Fässler-Moser-Margaritis-Basseng, véritable révélation de l’épreuve. La machine d’Ingolstadt avait vécu une course exempte de tout souci pour réaliser l’exploit du week-end et remporter du même coup la catégorie G2.

En GT2, c’est d’abord la Porsche 997 de Pilet-Long-Narac qui réalisait un festival en début de course. Mais une sortie de route de Narac sur une traînée d’huile signifiait la descente aux enfers de la machine allemande qui abandonnait en fin de matinée suite à un bris de moteur. La Ferrari de Cadei-Russo-Kaffer-Barba Lopez prenait le relais avant de disparaître durant la nuit (boîte de vitesses) et de céder le relais à l’autre F430 AF Corse de Bruni-Vilander-Melo-Perez Companc qui n’allait plus lâcher les commandes de l’épreuve qu’elle clôturait au 4ème rang absolu. Derrière la voiture rouge, Lucchini-Holzer-Miller-Ragginger sauvaient l’honneur du clan Porsche en concluant le double tour d’horloge en deuxième position, juste devant la Ferrari de Kirkaldy-Bell-Kox-Garcia.

Quant à la catégorie G3, elle avait été dominée quasiment de bout en bout par la jolie Ford GT Matech Racing de Mutsch-Martin-Wyss-Hennerici qui connaissait pourtant des soucis en vue du but. Malgré quelques sueurs froides causées par un problème de fond plat au sein de l’équipe suisse, la GT n° 121 conservait l’essentiel face aux Porsche de Lefort-Verbist-Forbes et de Loix-Paltalla-Lanik-Slingerland, toutes deux lancées à ses trousses.

Enfin, dans l’officieuse classe GT1 2010, la Nissan GT-R officielle avait bien tenu son rang en début de course avant de connaître des ratés-moteur qui allaient entraver sa progression et la contraindre à se contenter d’une quinzième place. Quant à la Ford GT du Marc VDS Racing, elle avait vu son moteur la lâcher après quarante minutes de course. Nullement désappointée, l’équipe belge procédait au changement du propulseur et permettait à la Ford de reprendre la ronde. Son parcours allait encore être ralenti par une sortie de route et des problèmes d’embrayage, mais la machine aux couleurs belges franchissait bel et bien la ligne d’arrivée.