Bruno Wouters

30 AVR 2012

De mon temps…

De mon temps… seraient tentés de dire les plus anciens d'entre nous, de mon temps, la moto, c'était ça! Pas question de super sportives, de trails, de GT, ni même de roadsters! La moto, c'était deux roues, un moteur, un réservoir et une selle. Si on la voulait sportive, on lui mettait des guidons bracelets et un réservoir allongé. Si on voulait une GT, on lui accrochait des valises. Une tout-terrain? Un grand guidon et des pneus à crampons! Et s'il faut retenir une silhouette de cette époque, nul doute que la Triumph Bonneville viendra à l'esprit de la majorité. Gracile et fine de ligne, représentative d'une grande part de la production avec son vertical twin et ses deux échappements, la Bonneville aura attendu 2001 pour réapparaître, se faisant brûler la politesse par une certaine Kawasaki W650 sur nos routes dès 1999! 

 

La W650 avait tout pour elle, et même un gabarit et une silhouette plus proches de l'ancienne Bonneville que la Bonneville 2001! Seules sans doute ses origines japonaises l'empêchaient de revendiquer une réelle légitimité, même si Kawasaki s'est empressé de faire référence à son propre passé, la W1, une moto copiant à l'époque les BSA A7/A10. Vous suivez? Bref, la W650 vécut discrètement à l'ombre de la Bonneville une dizaine d'années, disparaissant du marché pour non respect des normes Euro 3. Sans doute jaloux du succès des Triumph, Kawasaki a revu sa copie, en réalésant les cylindres de quelques cm3 pour porter sa capacité à 773cc au lieu de 676, et en les gavant dorénavant par injection. Dégât collatéral vraiment dommage, la disparition du kick qui apportait une touche de nostalgie quasiment unique dans la production actuelle, et drôlement pratique en cas de défaillance de la batterie!

Peu de changements

On reprochait à la W650 un comportement manquant de rigueur. Le cadre paraît identique mais sa géométrie évolue discrètement. Pas d'évolutions du côté des suspensions ni des freins: nous retrouvons donc avec plaisir la fourche classique nantie de soufflets, les deux amortisseurs arrières, mais avec un peu de suspicion le tambour arrière… Guère d'évolution esthétique non plus, et il faudra un œil exercé pour reconnaître une W800 de son aînée la W650. Le kick a disparu, on l'a noté, le cuvelage de phare est peint, l'écusson de réservoir s'orne d'un "W", les carburateurs disparaissent au profit d'une injection occultée par des bouts de métal, les amortisseurs laissent voir leurs ressorts et les pots d'échappement saucisson se voient greffer une tôle de protection contre la chaleur. Le travail ne manque pas de talent et au premier regard la W800 fait parfaitement illusion, au point de la confondre avec une ancêtre.

On la confondrait presque avec une ancêtre!

De plus près certains détails fâchent un peu, comme le dégradé de couleur sur le réservoir, grossièrement tramé, la fenêtre digitale dans le compteur de vitesse, les bouts de tôles sensés camoufler l'injection ou protéger de la chaleur des pots. De petites fautes de goût qu'il eut été facile d'éviter, alors que même les sculptures des pneus paraissent d'époque avec des montes Dunlop K81 TT 100, le must dans les années 60-70! On le voit, à quelques détails près, l'illusion y est. Ça se confirme une fois la belle enfourchée. Un gabarit menu, une hauteur de selle réduite, une position de conduite naturelle et détendue, de quoi mettre tout le monde à l'aise.

Placide, mais vivante

Le moteur émet un son étouffé, mais meut notre néo-rétro avec entrain. Inutile d'aller titiller le fond du compte-tours, mieux vaut goûter aux bas et mi-régimes, là où le couple se fait le mieux sentir. Pas d'excès de puissance donc, mais un petit moulin vivant et bien suffisant pour rendre la conduite attrayante. De toutes façons, le châssis ne revendique guère de prestations sportives, et se montre fort respectueux de l'esprit de l'époque qu'il tente de nous faire revivre. Nous sommes loin de l'efficacité d'un roadster actuel, but who cares?! Ce n'est clairement pas le but, et on se surprend au guidon de la W à retrouver des plaisirs démodés mais ô combien adaptés à notre époque, ceux d'une conduite détendue, qui laisse le temps de la découverte, un petit parfum de nostalgie où on avait le temps de prendre le temps, de goûter au vent sur le visage, aux odeurs dans les narines, aux couleurs dans les yeux. Ils avaient tout compris, nos papys!

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