La Touring, vous connaissez. Une splendide machine, que nous pourrions assimiler à la Road King Classic de chez Harley-Davidson. Si nous devions effectuer le même exercice avec le Custom, nous pencherions sans doute pour la Fat Boy. Mais, au risque de faire hurler les bikers tatoués au twin de Milwaukee, les italiennes enterrent les américaines à tous points de vue. Ces motos méritent vraiment d'être découvertes, l'occasion se présente avec les trois nouvelles définitions qui viennent maintenant élargir la gamme.
La California 1400 Touring S.E. ne s'éloigne guère du concept de départ. Cette variante S.E. se caractérise par deux nouvelles peintures deux tons gris clair sur gris foncé, et inversement), un dossier passager, deux petits déflecteurs complétant la protection du pare-brise et… c'est tout! Le design ne change pas, la technologie non plus, et c'est tant mieux. Le fantastique V-twin face à la route, le plus gros twin européen par la même occasion, trône en maître dans le cadre en acier de la Guzzi, ses culasses à quatre soupapes mordant dans le réservoir.
Touring S.E.
Ce twin refroidi par air est toujours commandé par un "ride-by-wire" offrant trois modes, Turismo, Veloce et Pioggia, pour dompter les 120 Nm de couple à 2.750 trs/min et les 97 ch à 6.500 trs/min. La S.E. reprend le même freinage avec ABS confié à Brembo, le contrôle de traction (trois modes ici aussi) et les roues de 18" à l'avant, 16" à l'arrière, avec respectivement un pneu de 130/70 et un de 200/60.
Inutile de préciser que la conduite de la Touring S.E. ne diffère en rien de celle de la Touring et nous retrouvons ce cocktail caractéristique de cruiser à l'américaine, mâtiné d'une efficacité bien européenne. Le twin ne manque pas de caractère, et peut jouer différentes partitions.
On se la joue tranquille en enroulant sur les bas-régimes, mais il suffit de l'opportunité d'un dépassement pour dévoiler le caractère entier et puissant de ce moteur qui ne rechigne pas à pousser la chansonnette en montant avec vigueur dans les tours jusqu'au rupteur. La California Touring "pulse" alors avec force, filant immédiatement la banane à son pilote! Banane d'autant plus justifiée que la California dispose d'un freinage apte à calmer les enthousiasmes quand nécessaire.
L'appel au voyage
Le comportement reste un régal d'efficacité, avec en prime une garde au sol bien plus généreuse que celle habituellement prodiguée par ce genre de machine. Confort impérial, bien sûr, avec une position de conduite excellente et une protection permettant d'envisager de longues liaisons. Des bémols? Oui, bien sûr, comme les valises fixes rendant l'accès aux réglages des amortisseurs peu aisé, ou la chaleur dégagée par le moteur lors de cet essai effectué par 36° à l'ombre.
La California, que ce soit la Touring ou la Touring S.E. enterre la concurrence, avec style et panache. Elle gagnerait toutefois en attrait et en polyvalence avec des valises et un pare-brise aisément démontable: deux motos en une!
Vintage
Plus décalées et innovantes, l'Eldorado et l'Audace explorent des territoires différents. L'Eldorado joue à fond la carte de la nostalgie et du vintage, en puisant son inspiration dans la splendide Eldorado 850 qui connût un solide succès aux Etats-Unis, il y a plus de quarante ans.
Les références au passé sont nombreuses: réservoir au flancs chromés, selle généreuse, garde boue arrière redessiné avec feu arrière rond, habillage de la fourche et des amortisseurs, peinture rehaussée de filets sur le réservoir, les caches latéraux et les garde-boue, mais aussi roues à rayons avec pneus à flancs blancs.
Et c'est ici que ça devient intéressant, parce que les dimensions changent. Exit la monte de la California ou du Custom, place à du 130/90 x 16 à l'avant, 180/65 x 16 à l'arrière et, en fait, ça change tout! La position de conduite, très naturelle et confortable, ne s'éloigne guère de ce que propose la Touring, mais sur les routes qui serpentent dans la montagne qui domine Bellagio, l'Eldorado se montre particulièrement enjouée et vive, plus que la Touring.
Certes le poids joue, l'Eldorado gagne une bonne vingtaine de kilos, mais le pneu arrière de 180 joue un rôle non négligeable dans cette agilité, rendant l'Eldorado particulièrement agréable à mener sur ces petites routes de montagne.
Bad boy
Autre style avec l'Audace, qui se la joue plutôt "côté sombre de la Force", en assumant complètement son côté rebelle. Basse et dépouillée, elle accentue son style "power cruiser" par sa finition mate et une absence totale de chromes. Fourche dépouillée, petit phare rond, repose-pieds "classiques", échappements courts, guidon drag-bar, selle spécifique, le ton est donné au premier regard.
Ce qui ne se voit pas, c'est la mise en conformité du moteur aux normes Euro 4, via la cartographie, l'admission et l'échappement retravaillés. L'Audace perd encore quelques kilos, près de quarante gagnés sur la Touring, et les suspensions héritent d'amortisseurs arrières réglables en détente et en précharge.
L'Audace "pulse" évidemment plus que les autres déclinaisons de la California, et le rythme peut s'accélérer grâce à la garde au sol plus généreuse, aux suspensions plus précises et à la masse moins importante. Bémol, ce dynamisme se paie par une ergonomie exigeante et peu naturelle, la faute au guidon drag-bar, droit, large et très en avant, induisant une position de conduite fatigante et inconfortable.
Alors ces Guzzi, pourquoi faire? Facile, chacune joue une partition bien établie: la Touring S.E. pour le voyage, l'Eldorado pour la promenade, l'Audace pour frimer! Et quand on voit la mode du vintage ou toutes les California Custom virilisées croisées sur notre route, on se dit que Mandello a visé juste avec ses nouveautés!