La F800GS se doit de briller, héritage familial oblige, puisque c'est BMW qui le premier a lancé la mode des gros trails bicylindres avec la R80GS. Première d'une lignée au succès jamais démenti depuis 1980 et dont la dernière-née, la 1200GS est devenue un mythe (et un épouvantail pour la concurrence tant elle cumule les qualités). Ceci donne une idée des attentes fondées sur la petite sœur, la 800GS. Celle-ci reprend la mécanique pétillante des F800 dans un nouvel environnement, très "GS". Le look baroudeur transpire de partout, original comme celui de la plupart des BMW actuelles. On accroche ou on rejette, mais il faut reconnaître une certaine cohérence à l'ensemble. Ceux qui croyaient que BMW proposerait une petite moto par rapport à la 1200GS resteront un peu sur leur faim. Certes, sa finesse saute aux yeux, grâce au choix de la motorisation, un bicylindre vertical. Ce qui saute également aux yeux, et n'augure rien de bon pour la partie charnue de votre anatomie, c'est aussi la finesse de la selle. Beaucoup plus fine que celle de la 1200GS, mais encore plus haute, elle culmine à 880mm. Avec notre mètre quatre-vingt, on se sent malgré tout petit quand il s'agit de l'enfourcher.

En route

Première centaine de kilomètres pour aller chercher Madame et les bagages, et premiers constats. La belle se sent à l'aise sur l'autoroute, faisant preuve d'une remarquable stabilité et d'une bonne protection au vent. Hélas, l'air est canalisé vers le casque et les remous se font bruyants à la longue. Nous découvrons avec plaisir une bagagerie très proche de celle apparue en 2004 sur la 1200GS, avec des valises et un top-case "télescopiques". Les trois coffres peuvent s'élargir d'une simple manipulation, ce qui permet de réduire un peu la largeur de l'ensemble si le chargement le permet. Inutile de vous dire que nous sommes partis en configuration large! Direction Dijon, fissa par l'autoroute pour des questions de planning. Et de fait, nos craintes se confirment: nos fesses ne mirent pas longtemps à se plaindre du peu d'accueil prodigué par la selle qui, non contente d'être fine comme une lame, s'avère dure à la longue. Cette selle d'un seul tenant, remontant généreusement sur le (faux) réservoir semble directement échappée d'une enduro. Pour le reste, RAS et la moto semble apte à bouffer du kilomètre indéfiniment.

Souligné de vert

Une bonne nuit de sommeil, le lendemain un beau soleil et une magnifique route pour rejoindre Menton depuis Grenoble. Vous savez, ces belles traces sinueuses soulignées de vert sur les cartes Michelin… Quelques centaines de kilomètres de pur bonheur, à enquiller virages sur virages, dans des paysages magnifiques. La 800GS excelle à ce jeu-là, à un point tel que nous oublions complètement que nos sommes en configuration maxi: bagages et passagère! Étonnant: nous avons l'impression de piloter une moto en configuration "arsouille du dimanche après-midi"! Les suspensions fournissent un excellent travail, absorbant sans broncher toutes les inégalités, tout en guidant avec rigueur la moto sur ce merveilleux terrain de jeu. Le châssis, d'une rigidité extrême, permet de mener ce trail haut sur pattes comme un roadster. Les débattements importants (230mm à l'avant, 215 à l'arrière) sont parfaitement maîtrisés et les mouvements d'assiette limités, malgré une fourche classique et non réglable. Le freinage n'appelle pas de remarques particulières. Nous sommes contents de pouvoir compter sur l'ABS, mais nous aurions apprécié un peu plus de mordant à l'attaque.

Convaincante

Le moteur donne le meilleur de lui-même, et sans doute le meilleur de toute la famille "F". Vif, pétillant, rempli, souple puisqu'il répond parfaitement sur un filet de gaz, dès 1.500 à 2.000 tr/min, pour grimper sans faiblesse jusqu'à la zone rouge. Nous avons presque tout le temps roulé avec deux personnes à bord plus les bagages, parfois plus de dix heures d'affilée, jamais le moteur n'a paru à la peine, assurant des reprises tout à fait honorables et suffisantes, sans jamais nous frustrer. Le comportement dynamique apporté par la F800GS est tout simplement bluffant, que vous rouliez à vide ou à pleine charge. Une fois assimilée la hauteur de selle, très gênante lors des manœuvres, nous avons affaire à une machine qui se montre légère, avec une ergonomie particulièrement soignée. Le cadre treillis en tube d'acier se voit nanti d'une fourche inversée et d'un très beau bras oscillant en alu. Le moteur issu de la F800S est redressé, et ses 85ch répondent présent à la moindre sollicitation de la poignée de gaz. Oubliés les à-coups et les irrégularités ressentis au guidon des premières F800. Le moteur reprend avec finesse et progressivité, la transmission se fait complètement oublier, sauf pour l'entretien puisqu'il s'agit hélas d'une classique chaîne. On retrouve à la conduite les bons côtés des trails, à savoir une excellente maniabilité et une réelle légèreté, associées à une rigueur de comportement que ne renierait pas un roadster.

Au taquet

Le soleil de Menton nous a réchauffé la carcasse, pas assez pourtant pour nous tenir chaud quand nous en sommes repartis vers Sospel puis Breils, avant de redescendre sur Cuneo: la pluie nous a rejoint et le thermomètre de l'ordinateur de bord n'indiquait plus que 4,5°! Nous avons pisté dans les plaines du Nord de l'Italie, sur des nationales plutôt encombrées, vers le lac de Côme. Le tonus du moteur nous a permis de jouer à saute-mouton avec le trafic, nous permettant d'enquiller les kilomètres à un train soutenu. Après une excellente nuit sur les rives du lac, nous sommes repartis à l'assaut de la Suisse, rapidement traversée, pour longer le Rhin du côté allemand, ce qui nous permet d'écrire sans mentir qu'une F800GS chargée à bloc avale tranquillement et sans broncher les autoroutes allemandes à 200 km/h au compteur, soit 190 km/h réels au GPS. À l'aise partout, on vous dit!

Un bon crû

Cette 800GS se révèle un grand cru, la meilleure des F800 sans contestation, et la somme des qualités dont elle fait preuve pourrait presque faire de l'ombre à sa grande sœur, la 1200GS. Il lui manque pour cela une selle vraiment confortable et plus accessible, et une courroie ou un cardan. Pour le reste, elle brille par un comportement amusant, sportif et efficace, et se montre capable d'avaler les kilomètres sans rechigner. Une réussite qui se monnaie à un tarif très BMW: la moto vaut 10.200€, l'ABS 765€, les poignées chauffantes 210€, l'ordinateur 160€, la béquille centrale 120€, ne parlons pas de la bagagerie. Mais il faut admettre que, comme pour les autres BMW, ça les vaut.