Offensive allemande
A force de dévaler les Autobahn à fond de carlingue, les constructeurs allemands se sont engagés dans une délirante course à la puissance. Que ce soit sous la forme de berline, de coupé ou de break, il faut des chevaux ! Et beaucoup, même ! Aux côtés des variantes à moteur 2 litres diesel nous vantant des consommations de chameau, on retrouve donc des versions débordants de canassons et aux allures d’athlète bodybuildé. Il faut bien un équilibre…
560 chevaux, le minimum syndical
La RS6, on l’a connue avec un fantasmagorique V10 biturbo de 580 chevaux ! Trop, c’est trop, se sont sans doute dits les Teutons… Délaissant cette mécanique tectonique, les ingénieurs sont revenus à quelque chose de plus raisonnable, à savoir un V8 biturbo de 4 litres, soit le plus petit moteur du segment ! Mais il fallait bien répondre du tac au tac aux BMW M5 et autres Mercedes E63 AMG : Audi a donc surgavé son moteur jusqu’à le faire cracher la même puissance que ses deux concurrentes : 560 chevaux !
Pas très discrète…
Tout d’abord, il y a le look. Avec ses ailes hypertrophiées, ses jupes latérales, ses entrées d’air béantes et ses deux pipeline qui lui servent de tuyères d’échappement, on se doute fort qu’il ne s’agit pas du gentil break 2.0 TDI de votre beau-père… Contrairement à la S6 qui joue plutôt sur une certaine finesse, la RS6 évoque clairement la brutalité de sa mécanique. Même avec cette teinte discrète…
Ambiance !
Dans l’habitacle, les sièges au maintien renforcé laissent augurer de belles parties de plaisir. Le compteur, lui, annonce la couleur : 320 km/h ! Et entre les logos RS6 et les inserts en aluminium, on se doute bien que la chose n’est pas exactement prévue pour promener bobonne en toute quiétude. Pourtant, l’ambiance n’est pas si différente d’une A6 classique lourdement « optionnée »… A ce titre, on soulignera la superbe qualité du cuir matelassé…
En douceur, disions-nous…
C’est avec la délicatesse d’une maman tenant son bébé dans les bras que j’aborde les premiers kilomètres… C’est qu’outre l’accélérateur très réactif, la pédale de freins a tendance à envoyer le conducteur droit sur son volant, à la première pression un peu vive ! Bref, en douceur, disions-nous…
Et à ce train-là, le V8 se fait complètement oublier, la boîte automatique enchaine les 8 rapports avec douceur et la suspension fait son possible pour absorber les ondulations de terrain. Bon, avec une orientation aussi sportive, le confort ne peut égaler celui d’une version plus sage, mais le niveau reste correct…
Et puis, zut !
Une fois la chose en température, difficile de résister à la tentation. On chatouille les gaz et… le dragon, piqué au vif, devient furibard ! Au-dessus de 2.700 tr/min, les orgues sont lâchés et l’échappement insulte la route de ses jappements rauques ! On se sent plaqué contre le dossier, alors que l’on devine encore une belle réserve sous le pied droit. Appuyez à fond et… l’orage tonne ! Avec la voix d’un Tom Jones en colère, le V8 explose ! A ce rythme, le permis fond aussi vite que le plein d’essence…
Scotchée !
Avantage irréfutable des quatre roues motrices de la RS6, la facilité d’exploitation ! La transmission intégrale assure un comportement sûr et fidèle. Que la route soit sèche ou glissante, la cavalerie a le bon goût de catapulter la chose ! Sincèrement, on a beau être un fondu des propulsions sauvages, difficile de rester insensible à une telle efficacité…
Drôle !
Surtout que, une fois le mode sport sélectionné pour le différentiel arrière, la bête peut se révéler vivante ! Sur terrain un peu gras, il suffit de jouer des gaz en sortie de virage pour entretenir un sympathique survirage. Un vrai vélo ! Et si le virage se referme méchamment, un petit lever de pied aura pour conséquence de resserrer la trajectoire. Bluffant !
Mais pourtant… On ne s’encanaillera jamais à pousser la chose dans ses retranchements : la RS6 est lourde, ce qui se ressent en virage serré. Quant au freinage, tout carbone soit-il, il ne supportera pas pareil traitement très longtemps. On pense également aux pneus, suffoquant sous les bourrades velues des 700 Nm du V8 biturbo.
Budget
A 110.100 € le morceau, on aura vite fait de considérer l’engin comme outrageusement cher ! Pourtant, tout bien considéré, la RS6 cumule la puissance d’une Ferrari 458 Italia dans un ensemble aussi habitable que soigné et pratique, pour un prix largement inférieur à ladite Ferrari. Attention toutefois aux options, alourdissant très rapidement la note… Et Dieu sait si ces dernières sont tentantes !
Côté consommation, tout dépend de votre pied droit. Au terme de quatre jours, ma moyenne n’aura pas excédé 13 l/100 km, ce qui est remarquable. Il faut saluer le système de désactivation de la moitié des cylindres à faible charge, ayant un grand rôle dans ce bon résultat. Mais à faire constamment parler la poudre au V8 et les chiffres s’envolent rapidement au-dessus des 20-25 l/100 km !
Conclusion
La RS6, c’est une machine de guerre pouvant donner le meilleur d’elle-même en toutes circonstances, en dépit d’une puissance effrayante. Un engin parfaitement exploitable au quotidien, car modulable, confortable, sûr et spacieux, mais également capable, à l’occasion, d’estomaquer quelques sportives égarées sur son chemin. Du beau travail…